La position des femmes en milieu coutumier s'est posée il y a peu et de façon très vive, en lien avec le droit pénal.
La modification de la loi organique, s'agissant du tribunal compétent en matière d'indemnisation des victimes, était justifiée par une réalité devenue insupportable, tant pour les juristes que pour les juges de Nouméa et pour les associations de femmes, qu'elles soient d'origine européenne ou issues du milieu coutumier.
En matière d'indemnisation, les femmes victimes de violences de toute nature se voyaient appliquer la réglementation de la coutume. Au-delà de la faute pénale, pour l'indemnisation des victimes, ce sont les intérêts civils qui s'appliquent, relevant de la coutume. On se trouvait parfois dans des situations où la femme victime en était réduite à devoir demander pardon à son agresseur parce que la règle coutumière l'imposait ou bien elle n'obtenait pour toute indemnisation qu'un billet de 500 XPF. Vous apercevez à nouveau cette grande division entre l'application du droit civil commun et du droit coutumier qui a motivé la modification de la loi organique.
L'article 25 de la loi organique n° 2013-1027 du 15 novembre 2013 a ainsi complété l'article 19 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : « Par dérogation au premier alinéa et sauf demande contraire de l'une des parties, après s'être prononcée sur l'action publique concernant des faits de nature pénale commis par une personne de statut civil coutumier à l'encontre d'une personne de même statut civil coutumier, la juridiction pénale de droit commun, saisie d'une demande de dommages et intérêts, statue sur les intérêts civils dans les conditions prévues par la loi.
« En cas de demande contraire de l'une des parties, prévue au deuxième alinéa, la juridiction pénale de droit commun ordonne le renvoi devant la juridiction civile de droit commun, siégeant dans les conditions prévues au premier alinéa, aux fins de statuer sur les intérêts civils. La décision de renvoi constitue une mesure d'administration judiciaire qui n'est pas susceptible de recours. »
Le grand chef Nidoïsh Naisseline lui-même a été le premier à se saisir de cette difficulté. L'initiative est donc venue du monde coutumier et il y avait un ferment social favorable.
J'ai assisté aux travaux des sénateurs coutumiers sur le socle commun. Ils s'interrogent sur les lois successorales, le statut et les droits des mères célibataires en milieu coutumier. Ce sont aujourd'hui des réalités qui ne peuvent plus être ignorées. Les sénateurs s'interrogent sur le fait de savoir si la coutume ne devrait pas évoluer et ménager une place spécifique à ces femmes qui sont dans une situation inconnue de la coutume mais qui se banalise.
J'ai évoqué l'importance des dévolutions patriarcales. Néanmoins, dans le monde mélanésien, parce qu'elles donnent la vie, les femmes ont une place essentielle. Dans les discussions en milieu coutumier, les femmes prennent toute leur place, et parfois même vigoureusement !
Les conflits de lois ont donné lieu à une étude de fond, théorique mais qui propose également des solutions pratiques, menée par Sandrine Sana Chaillé de Néré, professeur des universités de l'Université de Bordeaux en 2012. De la même façon que nous avons identifié la question des conflits de lois, nous avons perçu que la question de la propriété intellectuelle et industrielle était l'une des difficultés susceptibles d'émerger.
En effet, la Nouvelle-Calédonie est aussi un territoire où l'économique est prégnant. Le minerai, les recherches, les terres rares sont des sujets sensibles à ce droit.
Nous avions proposé une convention du Gouvernement avec l'INPI qui a effectué une mission sur place. La difficulté est née au moment où le Gouvernement de Nouvelle-Calédonie a voulu se saisir de sa compétence et a présenté la convention avec l'INPI comme une situation intermédiaire qui lui permettrait de prendre le temps de s'imprégner de ce droit très technique, tout en laissant à l'INPI national le soin de le régir momentanément. Le Conseil d'État est intervenu et a estimé que cette solution intermédiaire n'était pas juridiquement viable. Ou bien le Gouvernement se saisissait de sa compétence et modifiait les termes du code de la propriété et s'appropriait les règles de ce droit de fond, ou bien il ne s'en saisissait pas et le droit ancien s'appliquait.
Actuellement, nous sommes dans cette seconde situation. Comme le législateur calédonien n'a pas légiféré, c'est le droit commun ancien qui subsiste. Vous percevez l'anachronisme dans lequel nous sommes actuellement. Pour déposer un brevet, l'industriel calédonien doit s'adresser à l'INPI alors que la compétence est entre les mains du législateur calédonien. Cette anomalie risque de perdurer encore un certain temps.
Pour conclure, je vous invite à lire les avis du Conseil d'État qui dressent parfaitement le cadre juridique des effets et limites du transfert de compétences.