Repenser dès maintenant les prérogatives et le rôle du détachement français aurait donc pu être cohérent et aurait permis d’engager une telle consolidation. D’une telle omission résulte une impression d’inachevé. Comme nous le répétons sans cesse, nous devons inscrire notre action dans une approche à long terme. À défaut, toute intervention militaire française est vouée à l’échec. En ce sens, nous ne pouvons pas nous affranchir de l’aide au développement et de la coopération.
S’agissant du texte lui-même, son article 15 suscite de fortes réserves de notre part. Il prévoit que la justice de l’État d’accueil est compétente pour certaines infractions commises sur son sol. Classique dans ce type d’accord et cohérente au regard du principe de territorialité de la loi pénale, cette stipulation n’en est pas moins problématique. La situation de déliquescence dans laquelle se trouve l’État malien fait en effet obstacle à ce que la justice y soit rendue dans le respect des droits de l’homme, et ce malgré les garanties de procédure visées dans cet article. Le fait que ces stipulations n’aient vocation à ne régir que de rares cas ne saurait nous dispenser de leur examen au vu des principes qui fondent notre conception de la justice, dans un état de droit respectueux des droits de la défense.
Plus largement, cet accord soulève la question de notre politique en Afrique.
Depuis 2008, la volonté affichée de sortir des vieux schémas afin de mettre un terme à une France « gendarme de l’Afrique », pour lui substituer un système de sécurité collective, n’est pas mise en œuvre de façon cohérente, faute de réflexion d’ensemble. La révision des accords de défense visant à mettre un terme aux pratiques d’antan, faites de clauses d’assistance, parfois secrètes, ne s’accompagne pas toujours d’un redéploiement adapté de nos forces en Afrique. La logique qui guide ce redéploiement hésite entre la défense d’intérêts bien compris et la lutte contre le terrorisme. Or, face à une menace terroriste qui essaime au Sahel et ailleurs en Afrique, l’hésitation est une impasse dangereuse.
Une stratégie d’ensemble, sans tabou ni déni, est plus que jamais nécessaire. Force est de l’admettre, le fait que les accords avec les pays africains nous soient soumis isolément, sans débat d’ensemble, est bien le reflet de ce manque de cohérence et d’ambition.
Vous l’aurez compris, l’objectif affiché de cet accord nous semble, certes, souhaitable, mais le groupe écologiste nourrit d’importantes réserves. Nous nous abstiendrons donc sur ce texte.