Merci de nous accueillir pour cette table ronde qui traite du sujet majeur de l'accès aux soins. La catastrophe programmée que l'on annonce depuis de nombreuses années se révèle, depuis quelque temps, plus grave encore que ce que l'on imaginait il y a une décennie. Il y a aujourd'hui un désert républicain, dont le désert médical n'est qu'une expression. Comme cela a été dit, il est vain de penser que les incitations amèneront les médecins dans des lieux où la République a retiré ses services. Seul un vaste programme d'aménagement du territoire est susceptible d'apporter des réponses - et nous sommes là pleinement dans le champ de votre commission.
Nous sommes convaincus, en deuxième lieu, que la formation actuelle des médecins ne permet pas aux jeunes professionnels d'anticiper des parcours professionnels ; qu'il n'y a pas de professionnalisation au coeur des études médicales. Il faut aujourd'hui cinq ans, après le diplôme, pour qu'un jeune médecin envisage son installation, alors qu'il y a vingt-cinq ans, la plupart des médecins avaient trouvé, dans l'année suivant leur thèse, le poste dans lequel ils allaient accomplir leur métier.
Troisième observation : il est vain de penser que nous fixerons des médecins dans les territoires pour toute leur carrière. Les jeunes professionnels ne veulent pas se voir imposer une carrière linéaire. Ils veulent de la mobilité et une mixité des exercices.
Pour parvenir à mettre en place des solutions, il faut mener, sur ces trois questions, une réflexion forte. Pour agir dès le court terme, il faut gagner sur ces cinq années d'installation, et créer un poste DES (diplôme d'études spécialisées) d'exercice dans les territoires de mêmes caractéristiques que le poste DES de chef de clinique assistant, permettant de fixer des praticiens dans les territoires en leur offrant les avantages des postes DES.
On ne peut que constater l'échec des mesures incitatives, qui n'ont pas permis d'aboutir. Nous ne sommes pas parvenus à créer les conditions d'une incitation rationnelle, équilibrée sur l'ensemble du territoire, et ce sont bien plutôt les initiatives des acteurs locaux, en particulier lorsqu'elles sont multifactorielles, associant l'université, la formation, les ordres régulateurs et l'ensemble des acteurs, qui ont donné des résultats.
Il faut se soucier du court terme et mettre en place une politique de professionnalisation dans le cadre des études afin de permettre des choix précoces de parcours professionnels. Si nous n'investissons pas dans le champ de la professionnalisation, il ne restera pas d'autre réponse que la contrainte, à laquelle nous ne sommes pas favorables - j'aurai l'occasion, dans le cours des échanges, de revenir sur les échecs d'une telle politique menée dans d'autres pays européens.