Sur la méthodologie, vous avez raison : en France, c'est surtout la politique du doute qui prédomine. Dès l'instant que quelque chose de nouveau apparaît, on doute, on cherche à savoir ce qui ne va pas, à expliquer pourquoi cela ne va pas marcher, plutôt que de s'enthousiasmer, d'être optimiste sur les progrès potentiels.
Dans le même temps, on trouve des documents qui précisent des stratégies nationales en matière de recherche, d'enseignement supérieur, de culture scientifique et technique. Ces documents préconisent la politique du « oui ». Je défends la société du « oui » plutôt que la société du « comment » ou du « pourquoi cela n'a pas marché ».
Vous parliez du temps. Il s'agit non pas uniquement du temps de travail, mais également de l'allongement de la durée de la vie. Nous devons réfléchir aux moyens de prendre en considération cette partie de la vie supplémentaire pour qu'elle soit une vie réussie et pas simplement une vie à moitié. J'ai pris tout à l'heure l'exemple de la robotique et du numérique au service de l'accompagnement des personnes à leur domicile. C'est un champ de développement économique et social extrêmement important, sur lequel de nombreux chercheurs et innovateurs doivent se pencher.
Vient ensuite la question de l'acceptabilité philosophique ou financière. C'est aussi un levier important. Peut-être le savez-vous, l'un des précurseurs des centres commerciaux, le groupe Mulliez, est en train de travailler aux centres commerciaux du XXIe siècle. Ce seront non plus des lieux d'achat mais des show-rooms où les gens se rendront pour regarder, prendre des conseils ; ce n'est qu'une fois revenus chez eux qu'ils commanderont sur internet. Le stockage des marchandises se fera ailleurs. Le premier centre de ce nouveau genre ouvrira aux portes de Roissy dans une dizaine d'années.
Lorsque vous expliquez que, grâce au big data et aux algorithmes prédictifs, une machine est capable de prendre en considération l'environnement, c'est exactement ce qui est en train de se faire aujourd'hui pour suivre les parcours de radicalisation : de nombreuses données sont mises à la disposition d'analystes et de chercheurs transdisciplinaires qui travaillent sur cette question. En l'espace de six mois, il n'y pas eu de révélations, mais un certain nombre d'objectifs a pu être mis en évidence. Pareille puissance d'analyse n'était pas du tout envisageable sans l'apport de la machine.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous sur le fait que l'être humain n'est pas disposé à accepter le diagnostic numérique. Non seulement les gens vont consulter internet pour avoir des informations sur leur pathologie, leurs symptômes, mais, quand il n'est pas possible en France d'effectuer certaines analyses, notamment génétiques, pour des raisons éthiques, les gens envoient leurs échantillons de cellules dans d'autres pays via l'outil numérique. Ils font tout à fait confiance.