Intervention de Bruno Sido

Réunion du 2 mars 2016 à 14h30
Situation financière des départements

Photo de Bruno SidoBruno Sido :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, hier s’est tenue l’assemblée générale de l’Assemblée des départements de France, dont j’ai l’honneur et le plaisir d’être l’un des vice-présidents.

La situation financière des départements est devenue très tendue, tout simplement en raison de « l’effet de ciseaux », bien connu, que nous dénonçons depuis au moins cinq ans. Vous le voyez, mes chers collègues, sur un sujet d’une telle importance, il n’y a pas de gauche ou de droite, mais plus fondamentalement un rapport de confiance à préserver entre l’État et les collectivités locales.

Les causes de cette situation sont toutes simples : les allocations individuelles de solidarité que sont l’allocation personnalisée d’autonomie pour nos aînés, la prestation de compensation du handicap et le revenu de solidarité active. Elles représentent autant de dépenses dynamiques, en raison de la démographie et de la crise économique qui frappe le pays.

En cinq ans, ces dépenses ont augmenté de 3, 4 milliards d’euros, soit une progression de 13, 2 % par an. Mais comme l’État n’a pas les moyens de compenser intégralement cette politique sociale que nous mettons pourtant en œuvre pour son compte et selon les critères qu’il définit, le reste à charge pour les départements se monte, pour le seul RSA, à 4 milliards d’euros en 2015.

Parallèlement, l’État « associe les collectivités à l’effort de redressement des comptes publics », si je puis dire, en ponctionnant 4 milliards d’euros sur les ressources des conseils départementaux d’ici à 2017.

Il est temps de tirer la sonnette d’alarme avec force, comme nous l’avons déjà fait : nous n’avons plus les moyens de financer cette politique publique. Ce message a clairement été relayé par Dominique Bussereau, président de l’ADF, auprès du Gouvernement, devant les 10 départements en 2015, devenus 40 départements en 2016 – ils seront 80 en 2017 et 100 en 2018 ! –, débordés par les dépenses de RSA.

Que l’État assume le financement direct de cette prestation nationale, dont les critères d’éligibilité et les montants sont décidés par le Parlement, est une bonne chose, très cohérente. Que les départements poursuivent leur engagement pour l’insertion, parce qu’ils ont les outils et la connaissance du terrain, fait également pleinement sens. C’est avec ce double objectif, juste et cohérent, que l’ADF négocie avec l’État.

Voilà, mes chers collègues, ce qui occupe le devant de la scène. Mais je souhaite aujourd’hui aussi appeler votre attention sur les transferts de charges « masqués » ou officieux dont on parle trop peu.

Partout ou presque en France, les départements gèrent les routes, tandis que VNF, Voies navigables de France, veille à l’entretien des canaux et au bon fonctionnement des ponts qui passent dessus. Sauf qu’en pratique, à tout le moins en Haute-Marne, mais je suppose qu’il en est de même ailleurs, le conseil départemental se trouve contraint, non seulement de financer les deux tiers des travaux, mais en plus d’en assurer la maîtrise d’ouvrage.

Alors, me direz-vous peut-être, il suffirait de dire « non » pour placer l’État face à ses responsabilités. Sans doute, mais quand le pont est vétuste, la circulation interdite, la vie des entreprises perturbée et la population mécontente, ce sont les élus locaux et très directement les départements qui sont en première ligne. Voilà quinze jours, nous avons inauguré un pont-levis dans la commune de Humes-Jorquenay. C'est un beau pont tournant qui a coûté 1, 5 million d’euros, dont 66 % financés par le département. Et pas moins de cinq ouvrages de ce type sont encore à réaliser, autant pour des questions économiques que de sécurité !

Sur le plan de la sécurité précisément, les casernes de gendarmerie – compétence régalienne s’il en est ! – et de sapeurs-pompiers sont largement cofinancées par les conseils départementaux. Vous le savez, mes chers collègues, la contribution des communes aux SDIS est stabilisée. Par conséquent, toute dépense nouvelle est assumée par le département, qu’il s’agisse d’immobilier, d’équipement ou encore tout simplement des évolutions de la masse salariale décidées sans concertation aucune à Paris, mais payées localement. Grâce à la mutualisation des moyens, nous réalisons toutes les économies possibles – c'est vrai dans tous les départements –, à niveau de service constant. Mais les marges ont disparu à présent.

En revanche, les transferts masqués, eux, ne manquent pas et grèvent lourdement les finances départementales. Depuis la loi Peillon de 2013, par exemple, les conseils départementaux assurent la maintenance des systèmes informatiques des collèges. Bien sûr, dit comme cela, certains penseront que mon observation est mesquine.

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