Intervention de Jean-Michel Baylet

Réunion du 2 mars 2016 à 14h30
Situation financière des départements

Jean-Michel Baylet, ministre :

J’imagine que cela rassurera MM. Savary et Bas.

J’ai souvenir du rapport Krattinger-Raffarin, fruit d’une mission commune d’information sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la République. On y préconisait une diminution du nombre de régions et réaffirmait la place centrale du département, notamment dans les zones rurales, comme collectivité de la solidarité et de la proximité. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le Premier ministre Raffarin, je souscris totalement à cette vision.

Comme l’an passé, votre hémicycle accueille donc un échange consacré aux finances des conseils départementaux, sur l’initiative du groupe Les Républicains. Cette question préoccupe bien évidemment nos concitoyens et les élus de tous les territoires, dont vous êtes, ici au Sénat, les porte-parole naturels.

Au-delà du caractère hétérogène de la situation de chacun d’eux, les départements partagent tous les mêmes difficultés. En effet, bien que bénéficiant, pour la totalité d’entre eux, et même si les approches sont, ici ou là, différentes, d’une bonne gestion, les conseils départementaux connaissent un effet de ciseaux entre la baisse des recettes et la hausse des dépenses, notamment sociales, aspect qui a été présent tout au long de ce débat. La dégradation qui s’ensuit s’illustre notamment par une diminution du taux d’épargne brute, inférieur à 7, 5 %, voire dans certains cas à 5 %.

À la différence de l’année dernière, le débat intervient dans un cadre institutionnel stabilisé depuis le vote de la loi NOTRe, adoptée à la suite d’un accord en commission mixte paritaire l’été dernier. Même si ce texte prévoit plusieurs dispositions qui ont un impact important sur les finances locales, et plus spécifiquement départementales, comme le Premier ministre l’a indiqué, la réforme territoriale « ne remet pas en cause l’avenir du département », et nous en sommes vous et moi très satisfaits. Le département est au contraire renforcé, et vous l’avez souligné, dans son rôle de solidarité territoriale et sociale.

S’agissant de la solidarité territoriale, je veux souligner, même si ce point déborde légèrement le cadre du débat qui nous réunit, le rôle primordial du département, notamment dans le domaine de l’ingénierie, en direction des collectivités les plus petites ou les moins bien équipées.

Pour ce qui concerne la solidarité sociale, je rappelle que le département est compétent en matière de prévention ou de prise en charge des situations de fragilité, de développement social, d’accueil des jeunes enfants, ou encore d’autonomie des personnes. Il doit naturellement pouvoir disposer des moyens financiers qui lui permettent de remplir ses missions le mieux possible et d’exercer ses compétences dans de bonnes conditions. C’est, finalement, tout l’objet du présent débat.

Je ne peux, à ce titre, occulter l’effort demandé aux départements dans le cadre du vaste plan d’économies lancé en 2014. L’effort ainsi réclamé à tous – État, opérateurs, organismes de protection sociale et collectivités – est important et participe au nécessaire assainissement de nos comptes publics. Sur les 50 milliards d’euros d’économies répartis sur trois ans, 11 milliards d’euros sont supportés par l’ensemble des collectivités territoriales.

Pour les départements, cette contribution se traduira, en 2016, par une diminution de 1, 14 milliard d’euros de leur dotation globale de fonctionnement, la DGF. En effet, c’est beaucoup ! Je ne le conteste pas.

Pour 2017, il est prévu un effort collectif renouvelé. Comme les années précédentes, celui-ci sera accompagné d’un suivi fin et adapté, tous les départements n’étant pas confrontés aux mêmes difficultés.

Si la situation des finances départementales est préoccupante, c’est principalement du fait de la progression des dépenses de solidarité.

D’une manière générale, ces difficultés sont à la fois sérieuses et anciennes ; des sénateurs de diverses sensibilités ont eu la franchise de le relever. Elles ont fait l’objet d’une attention particulière de la part des gouvernements successifs, surtout depuis 2012.

Si le département est en première ligne pour intervenir auprès des personnes âgées, des personnes souffrant d’un handicap ou de celles qui se trouvent en situation de précarité, nous devons reconnaître que les difficultés se posent de manière distincte selon les territoires concernés.

Je vais revenir sur ces différents points de façon plus détaillée.

En 2015, les dépenses de fonctionnement des départements se sont élevées à 60 milliards d’euros, contre seulement 10 milliards d’euros, hélas !, pour les dépenses d’investissement.

Le RSA représente à lui seul près de 10 milliards d’euros, soit le même montant que l’investissement. En dix ans, son poids dans les budgets des départements a doublé. L’augmentation a été particulièrement plus rapide ces dernières années. Or, même si les recettes augmentent, il est difficile de faire face à une hausse de la dépense de 8 %, comme ce fut le cas l’an dernier.

Nous le savons, cette évolution est imputable non seulement à l’augmentation annuelle de 2 % de cette allocation, dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté, mais aussi et surtout aux effets de la crise économique que notre pays a subie.

Cependant, ainsi que nombre d’entre vous l’ont remarqué, mesdames, messieurs les sénateurs, le RSA n’est pas la seule préoccupation des départements, confrontés quotidiennement aux difficultés socio-économiques des Français dans toute leur diversité. Par exemple, certains départements sont plus que d’autres mis à contribution pour assurer l’accueil des mineurs isolés étrangers, les MIE. C’est notamment le cas de Paris, de la Seine-Saint-Denis ou du Val-de-Marne.

Le dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation des MIE a permis de réorienter un tiers d’entre eux. En outre, la loi de finances pour 2015 a prévu une participation de l’État à hauteur de 14 millions d’euros sur ce sujet.

Par ailleurs, une circulaire interministérielle a été transmise aux préfets, aux recteurs et aux directeurs d’agence régionale de santé le 26 janvier dernier. Elle vise à une meilleure coordination des services de l’État dans la prise en charge des MIE et à leur meilleure mobilisation aux côtés des départements, de l’entrée des mineurs dans ce dispositif à leur sortie de celui-ci.

Enfin, la proposition de loi relative à la protection de l’enfant, adoptée hier par l’Assemblée nationale, prévoit que le Gouvernement fixe désormais des objectifs de répartition des MIE sur le territoire, en lien avec l’autorité judiciaire. Un décret d’application sera rapidement publié et les départements seront associés à sa rédaction.

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