Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Réunion du 2 mars 2016 à 14h30
Trentième anniversaire du baccalauréat professionnel

Najat Vallaud-Belkacem, ministre :

Pourtant, avant d’aller regarder ce qui se fait ailleurs, avant de vanter le modèle allemand, souvent d’ailleurs sans le connaître très précisément, il est très important selon moi de regarder ce qui se fait ici, en France. En effet, la formation en alternance ne se résume pas ici à l’apprentissage : elle comprend aussi l’enseignement professionnel.

En évoquant celui-ci, j’aborde une voie dont la réputation n’est pas forcément à la hauteur de ce qui s’y passe concrètement, une voie qui est encore aujourd’hui ignorée et méconnue, alors même qu’elle répond depuis des décennies à un enjeu absolument essentiel : l’avenir économique de notre pays et sa prospérité.

Voilà pourquoi j’ai tenu à ce que soient célébrés cette année, de la meilleure des façons possibles, les trente ans du baccalauréat professionnel.

C’était en effet l’occasion de redonner un cap, une visibilité et du sens à cette voie qui, je tiens à le souligner, est une voie exigeante et une voie d’avenir, pour nos élèves comme pour notre pays tout entier.

L’enseignement professionnel forme depuis trente ans les ouvriers, les techniciens et les employés qualifiés dont la France a besoin.

Nous disposons sur le territoire national de 1 600 lycées professionnels. Chaque année, comme vous l’avez rappelé, près de 700 000 jeunes y sont formés à plus de 100 spécialités professionnelles. Celles-ci couvrent des domaines extrêmement variés, depuis l’hôtellerie-restauration jusqu’aux métiers d’art, en passant par l’aéronautique, l’automobile ou encore les services à la personne.

Certains de nos lycées professionnels intègrent d’ailleurs également une unité ou une section d’apprentissage, preuve que l’enseignement professionnel et l’apprentissage ne s’opposent pas.

Loin d’être en concurrence, ils sont en réalité deux voies complémentaires.

L’enseignement professionnel et l’apprentissage ne répondent tout simplement pas aux mêmes besoins de la part des élèves. Ils ne correspondent pas aux mêmes profils et proposent deux objectifs distincts.

L’apprentissage, pour lequel votre assemblée a manifesté depuis longtemps, et à raison, son attachement, prépare majoritairement les élèves au certificat d’aptitude professionnelle, tandis que l’enseignement professionnel mène quant à lui principalement au bac professionnel : neuf élèves sur dix passent le bac professionnel par cette voie.

Enfin, l’apprentissage repose sur le statut de salarié, les stages donnant lieu à une rémunération. Dans l’enseignement professionnel, en revanche, l’élève conserve son statut pendant les stages, ou périodes de formation en milieu professionnel. Autrement dit, aucun contrat n’est signé par l’entreprise d’accueil et le jeune, mais une convention de stage lie le lycée à cette entreprise.

Il existe également des différences relatives au nombre d’heures passées en entreprise : la répartition entre le temps en établissement et le temps en entreprise n’est pas la même suivant que l’on est apprenti ou lycéen professionnel.

Apprentissage et enseignement professionnel constituent donc deux voies distinctes qui répondent à des attentes et à des capacités différentes.

Certains élèves s’orienteront vers la voie de l’apprentissage, car ils auront une idée très claire du métier qu’ils souhaitent exercer et voudront être rapidement formés en entreprise, quand d’autres préfèreront recevoir une spécialisation plus progressive tout en bénéficiant d’une formation en alternance sous statut scolaire, ce que leur offrent les lycées professionnels.

Il existe toutefois quelque chose de commun à ces deux voies : le rapport solide qui se construit avec le monde professionnel. Cette relation est absolument fondamentale.

L’enseignement professionnel a besoin des entreprises et celles-ci ont besoin de ces jeunes professionnels. Leur relation doit donc être équilibrée. Voilà pourquoi s’est établi depuis plusieurs années un partenariat entre les lycées professionnels et le monde professionnel. Ce partenariat se révèle extrêmement fécond ; nous avons désormais suffisamment d’années de recul pour en juger.

Des preuves de ce succès, nous en avons tous les jours dans les réussites de nos élèves. Nous en obtenons aussi par le biais des comités où sont réévalués régulièrement les diplômes. Nous avons, ne serait-ce qu’à la dernière rentrée, réussi à rénover 19 de ces diplômes avec la plus grande fluidité. Oui, la relation entre le monde professionnel et l’enseignement professionnel fonctionne !

L’enseignement professionnel présente un autre atout : en conciliant des enseignements généraux et d’autres plus orientés vers la pratique, il évite aux élèves le piège d’une spécialisation trop précoce.

L’insertion professionnelle, pour les jeunes, est un cap, un objectif. Elle ne doit pas être un destin qui pèse de tout son poids sur l’élève. Dans la société d’aujourd’hui, un équilibre doit donc être trouvé entre une nécessaire spécialisation et une capacité d’adaptation, tout aussi précieuse compte tenu des nombreuses évolutions auxquelles chacun doit s’attendre au cours de sa vie professionnelle.

Voilà ce que permet l’enseignement professionnel. C’est aussi ce que nous défendons lorsque, par exemple, nous refusons de permettre à nouveau l’apprentissage dès quatorze ans.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion