Intervention de Bruno Sido

Réunion du 8 mars 2016 à 14h30
Maintien des communes associées en cas de création d'une commune nouvelle — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Bruno SidoBruno Sido, auteur de la proposition de loi :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier M. le président Retailleau pour son écoute afin de permettre l’inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour de notre assemblée.

Je le dis sans aucune flagornerie, mais pour une raison simple : si le devenir des communes associées dans le cadre de la création des communes nouvelles préoccupe les maires de la Haute-Marne, et sans doute aussi leurs homologues meusiens, ce sujet demeure relativement inconnu ailleurs en France.

Ce texte vise à combler un vide juridique et surtout à répondre à un problème d’équité. En effet, si la loi du 16 décembre 2010 prévoit un statut de commune déléguée pour les communes qui fusionnent, rien n’a été prévu pour les anciennes communes associées, précisément parce qu’elles étaient appelées à disparaître dans la commune déléguée, au sein du nouvel ensemble baptisé « commune nouvelle ».

C’était du moins l’idée de la Direction générale des collectivités locales, la DGCL, discutée par l’Association des maires de France, au nom d’une interprétation différente de cette loi.

Même si, comme l’écrivait le cardinal de Retz, « on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment », m’est d’avis que ce mot d’esprit s’applique plus aux relations humaines qu’au monde juridique. De mon point de vue, il était au contraire grand temps de sortir de l’ambiguïté !

Accepter sans rien dire cette situation aurait été indigne et injuste, puisque cela aurait signifié que les premiers à s’engager dans le processus de fusion seraient au final moins bien traités que les convertis de fraîche date aux vertus du regroupement communal.

Pour vous le dire comme je le pense, garder le silence sur ce sujet c’était trahir la confiance non seulement des maires d’aujourd’hui, mais aussi de tous ceux qui, dans les années soixante-dix, ont accepté d’avancer dans cette direction.

L’histoire commence le 16 juillet 1971 par l’adoption de la loi dite « Marcellin ». Raymond Marcellin fut député et sénateur du Morbihan, mais aussi ministre – notamment de l’intérieur – à de nombreuses reprises sous la IVe et la Ve république. Même s’il a débuté sa carrière ministérielle comme sous-secrétaire d’État à l’intérieur du gouvernement d’Henri Queuille en 1948, force est de constater qu’il n’a pas fait sien le fameux adage : « Il n’est pas de problème qu’une absence de solution ne finisse par résoudre ». Les communes de Haute-Marne peuvent en témoigner !

Ministre de l’intérieur du 31 mai 1968 au 27 février 1974, il succède à Christian Fouchet et, dit-on, le Général aurait salué son arrivée par ces mots : « Enfin Fouché, le vrai ». C’est dire le volontarisme politique dont l’auteur de la loi organisant les fusions de communes savait faire preuve…

Au début des années soixante-dix, donc, toute l’Europe avait engagé ce mouvement afin de disposer de plus vastes ensembles, mieux adaptés à l’exercice des responsabilités locales. Ainsi le nombre de communes a-t-il été réduit de 41 % en Allemagne depuis cette époque. Nos voisins d’outre-Rhin continuent d’ailleurs dans cette dynamique, comme me le confiait, le 18 février dernier, Annegret Kramp-Karrenbauer, ministre-présidente du Land de Sarre.

Toutefois, nos amis allemands affichent une densité de 231 habitants par kilomètre carré, contre 118 en moyenne en France et même 29 en Haute-Marne. C’est dire si nos situations sont différentes ! Administrer de vastes territoires faiblement peuplés représente en soi une problématique spécifique qui justifie une réponse adaptée aux besoins de proximité des habitants.

Réduire le nombre de communes en encourageant les fusions, tel était donc l’objectif de la loi Marcellin. En théorie, l’initiative appartenait aux conseils municipaux, puis le projet de fusion était soumis aux électeurs. Enfin, le préfet entérinait la fusion par arrêté, si les conditions de validité étaient respectées. À vrai dire, les choses ne se sont pas du tout déroulées de cette façon.

La nouvelle commune comprenait autant de communes associées, sections électorales jusqu’en 2013, disposant d’un maire délégué, à la fois officier d’état civil et officier de police judiciaire. Surtout, elle conservait les noms des anciennes communes et donc leur identité et leur mémoire.

Dans la pratique, le préfet et les sous-préfets, du moins en Haute-Marne, ont fait preuve d’un zèle absolument remarquable et, je l’espère pour eux, remarqué à Paris.

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