Intervention de Georges Labazée

Commission des affaires sociales — Réunion du 9 mars 2016 à 9h30
Cadre législatif et réglementaire applicable aux essais cliniques — Audition de Mme Geneviève Chêne directrice de l'institut de santé publique inserm

Photo de Georges LabazéeGeorges Labazée :

Votre réflexion est-elle nourrie par des exemples étrangers et européens ?

Pr Geneviève Chêne. - Du point de vue de la méthodologie des essais et de la réflexion scientifique, les scientifiques, s'agissant notamment des bonnes pratiques, travaillent plutôt à l'échelon international et européen. Lorsqu'on réfléchit sur l'intérêt d'un comité indépendant ou l'évolution de la méthodologie, l'ensemble de cette réflexion se nourrit des expériences étrangères, y compris nord-américaine. Les préoccupations sont les mêmes partout quant à la bonne marche des essais et la poursuite de l'innovation.

Vous aviez posé la question de savoir si, du point de vue de l'accès à l'information, le secret industriel était un obstacle au bon exercice de leur mission par les CPP et l'ANSM. À ma connaissance, l'ANSM dispose, a priori, du pouvoir de demander toute l'information nécessaire aux industriels et ceux-ci ont l'obligation de fournir ces informations. Le secret industriel n'est donc pas opposable à l'ANSM.

S'agissant des CPP, j'ajouterai que la loi Jardé leur donne compétence pour examiner les projets tant interventionnels que non interventionnels. Leur charge de travail ne va pas diminuer à l'avenir. En outre, les CPP ne fonctionnent pas de manière standard. C'est la raison pour laquelle je propose une répartition aléatoire et stratifiée par groupe de compétences.

S'agissant du contrôle de la méthodologie, je souhaite souligner à nouveau le caractère crucial de l'élaboration de la méthodologie des projets. Il est ainsi difficile de juger des aspects éthiques d'un projet sans pouvoir juger également de sa méthodologie et de ses aspects scientifiques. L'objectif de la méthodologie est ainsi d'aboutir au meilleur niveau de preuve possible, tout en respectant la sécurité des participants. Construire de tels projets est assez complexe et le protocole doit refléter cette justification scientifique qu'apporte la méthodologie. En effet, on peut s'interroger sur l'inclusion, dans des essais de volontaires sains, de personnes d'un certain âge, puisque celles-ci présentent davantage de risques de faire des événements graves. Inversement, la généralisation des résultats est plus compliquée à partir du moment où l'on n'étudie que des sujets jeunes. On peut également s'interroger sur l'interaction dans l'étude d'un produit donné d'autres substances comme le cannabis, le tabac ou encore l'alcool. Ce point est en effet crucial dans l'élaboration du protocole.

Ces points de sécurité sont essentiels. Comme l'a souligné le rapport de l'ANSM, tous les examens cliniques doivent être complets pour l'ensemble des personnes qui se prêtent à ce type de protocoles, ainsi que les conditions de levée de l'aveugle et tous les aspects afférents à la répartition des rôles que doit préciser un protocole ou un manuel d'opérations. Qui fait quoi lorsqu'un problème survient ? Un tel point doit ainsi être absolument précisé et toute imprécision dans ce domaine génère un risque pour les personnes.

Par ailleurs, s'agissant de la visibilité des essais cliniques, leur inscription à un registre international est une condition requise pour publier les résultats obtenus. Ce registre répond à deux objectifs : d'une part, éviter de reconduire des essais cliniques déjà opérés et, d'autre part, garantir la disponibilité des résultats des essais qui peuvent ne pas être publiés, ce dernier point étant favorable à la mesure du bénéfice risque.

S'agissant du contrôle a posteriori de la méthodologie, les promoteurs et l'ANSM peuvent toujours diligenter des audits sur place.

En ce qui concerne la préconisation du rapport d'étape de l'IGAS sur la mise en place d'une commission internationale à la suite de cet accident, il faut être vigilant face à l'impact qu'aurait une telle démarche en termes d'image. La France est membre d'un certain nombre d'instances internationales et à ce titre, elle peut porter cette demande dans ces instances d'une manière générale et non pour être évaluée sur une question particulière.

Je ne crois pas que la recherche publique doive bénéficier d'un cadre distinct, ni plus ni moins contraignant que la recherche privée.

Je répondrai enfin à la question de savoir si la mise en place des essais impliquant les enfants répond à un enjeu spécifique. Les essais « first in human », qui désigne la première administration chez l'homme d'un traitement, ne sont pas autorisés chez les enfants. Ce qui est très bien.

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