La collecte de ces données présente donc peu d’intérêt. Ce que veulent les enquêteurs, c’est savoir à qui appartient tel numéro. À cette fin, ils doivent pratiquer une triangulation et installer leur outil dans les différents endroits où ils pensent que la personne qu’ils surveillent se promène, de façon à rapprocher les données et à identifier le même numéro à trois ou quatre reprises, ce qui n’est pas possible en un seul endroit. Ensuite, la recherche s’apparente à de l’annuaire inversé.
Tous les numéros qui sont collectés dans le cadre de la triangulation n’ont strictement aucun intérêt, justement parce qu’ils sont uniques. Ce qui est recherché, c’est le numéro qui apparaît de manière répétée, celui de la personne suspectée. D’ailleurs, les collectes massives sont gênantes pour les enquêteurs, qui, je le répète, ne recherchent qu’un seul numéro.
Cette technique permet également une seconde utilisation, à savoir l’interception judiciaire. Celle-ci étant effectivement intrusive, un encadrement fixé par la loi est indispensable. Tel est l’objet de ces dispositions, y compris de celles que la commission des lois du Sénat a adoptées et qui minorent quelque peu, à nos yeux, l’encadrement que le Gouvernement appelait de ses vœux, tout en maintenant néanmoins les capacités d’enquête – nous reviendrons sur ce point tout à l’heure.
Pour les interceptions judiciaires, l’enquêteur connaît déjà le numéro visé et n’entre que ce numéro, ce qui signifie que l’IMSI-catcher ne sert plus que sur un seul numéro : il ne capte pas, par capillarité, toutes les autres conversations aux alentours ; il ne s’intéresse qu’au numéro que l’enquêteur a entré dans l’outil. L’IMSI-catcher agit dans ce cas comme un relais pour le téléphone. Pour toutes ces raisons, cet outil est bien encadré aujourd’hui.
Madame Cukierman, la loi relative au renseignement – je parle devant des membres de la délégation parlementaire au renseignement – n’avait pas vocation initialement à lutter contre le terrorisme. Elle visait précisément à encadrer les moyens des services de renseignement qui sont utiles pour lutter contre le terrorisme. Il s’agissait à l’origine d’éviter des pratiques en dehors du droit, qu’il fallait réglementer de façon à accroître leur efficacité.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.