La réalité, demain, c’est un texte qui aggravera l’échelle des peines et sera inefficace.
Monsieur le rapporteur, vous avez été garde des sceaux, vous savez fort bien que les magistrats correctionnalisent le crime lorsqu’ils ne parviennent pas à réunir une cour d’assises ou que c’est trop compliqué. On se retrouve alors malheureusement avec une échelle des peines inférieure.
Or, dans le texte actuel, l’échelle des peines pour les délits visés est déjà importante : dix ans d’emprisonnement. C’est important pour un délit ! Le fait de vouloir transformer ce délit en crime pour aggraver la peine va poser le problème de la capacité de la cour d’assises spéciale de Paris, qui sera saisie de tous ces faits. Or, dans le même temps, vous avez rajouté hier dans le code pénal une disposition, le délit de retour d’un théâtre d’opérations de groupements terroristes. Le ministre présent au banc du Gouvernement vous a fait remarquer que vous diminuiez le risque. Ce délit sera peut-être plus facile à constituer, mais il sera moins lourdement sanctionné.
Avec votre manière d’approcher les choses, on va à l’encontre de l’objectif que nous visons, qui est avant tout, je le rappelle, de lutter contre le terrorisme de manière efficace, en donnant à la police et à la justice les moyens de lutter et d’arrêter et, ensuite, de poursuivre et de sanctionner. Telle est la réalité !
Sur certains points, notamment à propos du juge de l’application des peines, vous dites que les dispositions que vous proposez sont plus simples et qu’il vaut mieux procéder ainsi. Monsieur le rapporteur, en raison de votre bilan personnel et de votre connaissance de la justice, vous devriez savoir que, pendant des années, la justice n’a pas toujours eu les moyens. On peut toujours espérer qu’elle en ait plus ! Elle en a d’ailleurs besoin dans tous les domaines, pas seulement dans celui du terrorisme, elle en a aussi besoin dans la justice du quotidien. La tâche est énorme ! Mais le rattrapage commence à se faire, notamment avec le recrutement massif de magistrats, alors que l’on a connu des périodes où l’on ne recrutait que quatre-vingts magistrats par an !