Intervention de François Villeroy de Galhau

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 30 mars 2016 à 9h38
Audition de M. François Villeroy de galhau gouverneur de la banque de france

François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France :

Le ministre de l'économie et des finances italien, Pier Carlo Padoan, propose en effet une forme de mutualisation en matière d'assurance chômage. La mise en oeuvre d'un tel dispositif à l'échelle européenne ne me semble pas envisageable dans l'immédiat car il bénéficierait davantage à certains pays. Néanmoins, un tel dispositif me semble souhaitable, dans un second temps, en tant que mécanisme de stabilisation collective. Cela suppose qu'il soit perçu comme étant au service d'un intérêt commun.

S'agissant de la balance des paiements des paradis fiscaux, malheureusement, nous ne pouvons pas contrôler la manière dont celle-ci est établie. Je partage le souhait qu'elle retrace le plus fidèlement possible l'ensemble des flux. Je tiens néanmoins à rappeler que des progrès importants ont été réalisés à l'échelle internationale en matière de lutte contre les paradis fiscaux. Le bilan du G20 depuis la crise sur ces questions est positif. Certes, tout n'a pas été réglé. Comme je l'ai déjà indiqué, il me semble indispensable d'aller plus loin en matière de coordination des politiques économiques. Néanmoins, les avancées en matière de coopération internationale, de règlementation bancaire et financière et de lutte contre les paradis fiscaux sont indiscutables. Certains pays, y compris proches de nous, ont fait des progrès sensibles en matière de coopération.

S'agissant de la question du bilan de la Banque de France qui, je le rappelle, est pris en compte dans le bilan de l'Eurosystème, il n'y a pas de limite théorique. Les réserves financières dont dispose la Banque de France sont solides, ce qui appuie la crédibilité de son bilan et sa capacité d'intervention. Les mesures non conventionnelles consistent à augmenter la taille du bilan de la banque centrale. Ce mécanisme n'est limité que par la solidité et la crédibilité de la banque centrale.

Pour ce qui est des provisions, la qualité des créances à notre actif a fait l'objet d'une analyse menée avec nos commissaires aux comptes et il ne nous est pas apparu nécessaire de passer des provisions. En revanche, le fonds pour risques généraux (FRG), qui n'est pas lié à une créance en particulier, a été porté, grâce à une dotation supplémentaire de 500 millions d'euros cette année, à 8 milliards d'euros au total. Cette « provision globale » renforce la solidité financière d'ensemble de la Banque de France.

Pour répondre à Michel Canevet, comme je l'ai indiqué à François Marc, il ne revient pas au superviseur de choisir le périmètre géographique du groupe Crédit Mutuel. Cela relève éventuellement de la responsabilité du législateur. En revanche, le superviseur européen, en l'espèce la Banque centrale européenne (BCE), demande que soit mis en place un organe central efficace, quel que soit le périmètre géographique auquel il s'applique. Si, par hypothèse, celui-ci excluait la Bretagne, cette question se poserait dans les mêmes termes. C'est le sens de l'approbation des statuts. Il est faux de croire que la BCE se contenterait du statu quo alors que le superviseur national, pour quelque obscure raison, et bien que cela ne relève pas de sa responsabilité, pousserait à la centralisation.

Les questions relatives aux difficultés du secteur primaire et à la présence du réseau de la Banque de France me semblent liées. L'appui bancaire est essentiel pour ce secteur et la médiation lui est accessible. En ce qui concerne l'organisation du réseau, depuis 2013, nous avons fait le choix, qui est réaffirmé dans le cadre du plan « Ambition 2020 », de regrouper certaines tâches de traitement pour améliorer notre efficacité mais de maintenir dans chaque département au moins une succursale destinée à être l'interlocuteur des entreprises, en particulier des TPE et des PME, et des ménages pour les questions de surendettement et de droit au compte. C'est ce que nous appelons les « succursales de présence de place ».

Pour répondre aux difficultés de crédits, deux leviers pourront être actionnés. En aval, les entreprises peuvent déjà avoir recours à la médiation du crédit. Le directeur de la Banque de France dans chaque département doit être au service des entreprises. En amont, le correspondant TPE aura pour mission d'informer, d'orienter et de conseiller les entreprises. Ces deux fonctions seront séparées au sein de chaque succursale afin d'éviter tout parti pris sur un dossier. J'étais hier à Lyon, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, afin de réfléchir sur l'organisation des « succursales de présence de place » et je me suis fait l'écho des remarques de certains parlementaires en rappelant l'importance de la présence d'un directeur actif et engagé auprès des entreprises et des ménages.

Nous devons, en effet, remettre un rapport d'ici le 1er mai en application de la loi du 13 juin 2014, dite loi « Eckert », sur les contrats d'assurance vie en déshérence. Si je ne dispose pas encore de chiffres, je peux vous indiquer que des progrès très sensibles pourront être constatés. Cette évolution n'est pas le fruit du hasard : en tant que superviseur des compagnies d'assurances, nous avons suivi de près cette problématique.

Enfin, concernant la question d'Éric Doligé, qui ne manquait pas de malice, les propos que je tiens sont les mêmes quel que soit l'interlocuteur. Mes responsabilités sont doubles : agir en matière de politique monétaire et contribuer au débat via la production de données et d'informations économiques. Il est cependant normal et essentiel que la responsabilité de la politique économique revienne aux pouvoirs exécutif et législatif.

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