Jusqu'à ce jour, le socle démocratique des établissements publics scientifiques et technologiques, les EPST, est constitué des conseils de laboratoire ou d'unité. Leur rôle consiste notamment à donner des avis dont le poids peut être considérable lors du renouvellement des structures.
Or plusieurs questions relatives aux rapports entre expertise collective et démocratie émergent actuellement.
Ainsi, la cooptation et la sélection des experts excluent de fait les débats contradictoires et posent le problème de la responsabilité scientifique, ainsi que celui de la mise en jeu de toutes les compétences ou expériences par rapport à un thème donné. Ce système confère souvent la légitimité maximale à la logique dominante.
Un chercheur est pourtant un citoyen parmi les autres, et non un « expert » dont le savoir fait loi et qui confère une légitimité du fait même qu'il parle en tant qu'expert.
Le chercheur doit assumer ses résultats non seulement par rapport à la communauté scientifique, mais aussi par rapport à la société : c'est un élément versé au débat démocratique. Évaluer, en effet, ce n'est pas uniquement porter un jugement de valeur : c'est se donner les moyens de corriger, d'évoluer et de prendre en compte les besoins.
L'évaluation mettant souvent en jeu des équipes et entraînant des conséquences importantes sur les carrières des participants, l'exigence de transparence suppose que l'on puisse recourir à des procédures d'appel.
En outre, l'évaluation doit être nationale et portée par l'ensemble de la communauté concernée.
La faisabilité d'un projet scientifique dépend en effet autant de l'évaluation de l'incertitude du but poursuivi que des moyens nécessaires à sa réalisation, notamment des moyens en individus - chercheurs, équipes techniques - et de la capacité du responsable de projet à diriger son équipe. La question de la représentativité des évaluateurs est donc primordiale.
Afin d'éviter autant que possible les situations de dépendance de l'évaluateur à l'intérieur de sa propre discipline ou, parfois, par rapport à des intérêts industriels directs ou indirects, c'est la multiplicité des approches de l'évaluation dans ses différentes composantes qui garantit le mieux la « qualité » de l'expertise.
Dans un contexte où l'expertise scientifique serait prise en charge par une hiérarchie de comités ad hoc émanant, par effet de chaîne, du ministre et chargésd'évaluer pour le compte de celui-ci, leseffets pervers pourraient être bien plus importants que ceux que l'on peutobserver dans le système actuel.L'avis des mêmes scientifiques étant requis, des positions redondantes seraient ainsi exprimées dans des lieux divers, où devraient pourtant s'exprimer des points de vue différents.
Nous assisterions alors à un subtil processus d'homogénéisation, « obstruant la voie » pour certaines thèses et autres travaux de recherches, qui se trouveraient ainsi marginalisés.
C'est pourquoi nous sommes résolument favorables à une évaluation par les pairs, à laquelle participeraient de façon prépondérante des élus représentatifs.