Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le soutien de l’agriculture française mobilise, une fois de plus, notre hémicycle. La grave crise que celle-ci traverse touche l’ensemble des territoires et ne laisse indifférents ni les élus ni l’ensemble de nos concitoyens.
Cette résolution, qui nous occupe aujourd’hui, vise à compléter les dispositifs assurantiels existants de gestion des risques agricoles.
Ces dispositifs sont actuellement de trois ordres : l’assurance récolte, dont le Gouvernement essaie de renforcer l’attractivité ; la dotation pour aléas, également renforcée par le Gouvernement ; enfin, le Fonds national de gestion des risques en agriculture, qui a vocation à répondre aux besoins en cas d’événement catastrophique.
La proposition de résolution requiert qu’on lui adjoigne un système global européen de sécurisation de l’aléa économique, complémentaire des aides de la politique agricole commune actuelle. Cela permettrait de faire face aux variations brutales des cours inhérentes aux marchés mondialisés, parfois sujets à une scandaleuse spéculation sur les matières premières agricoles.
Selon l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, pour 100 euros d’achat alimentaire sur le marché, quelque 8, 20 euros seulement reviennent à l’agriculture, 13, 20 euros aux industries agroalimentaires, 19, 20 euros au commerce, 14, 30 euros aux importations alimentaires, 15, 30 euros aux importations de biens intermédiaires comme l’alimentation animale, les engrais ou les pesticides et, enfin, 9, 30 euros aux taxes.
Je le redis : sur 100 euros de dépense alimentaire, seulement 8, 20 euros reviennent à l’agriculture !
En 2014, la moyenne des revenus d’une exploitation française, avant impôts et hors subventions, était de 600 euros pour l’année, quand la subvention totale moyenne par bénéficiaire s’élevait à 34 500 euros ! On comprend alors que, d’une certaine manière, nos agriculteurs français sont devenus des salariés de l’Europe et que, quand les marchés mondiaux toussent, c’est l’ensemble d’une filière qui s’enrhume.
Tout cela ne doit pas occulter de très fortes disparités au sein même de chaque filière. Les aides sont ainsi faites que les plus grosses exploitations en captent la plus grande part et sont, de ce fait, artificiellement plus rentables. Aussi, les aides devraient s’appuyer sur les UTH, les unités de travail humain – bien nommées –, plutôt que sur le nombre d’hectares.
L’intention de cette proposition est louable, elle est réaliste et pragmatique, mais elle me dérange, dans le sens où elle s’adapte à un système qui est, lui-même, à remettre en cause en profondeur. Cependant, je voterai en sa faveur, avec les réserves suivantes.
Cette proposition de résolution s’inscrit dans un cadre où les outils de régulation ont été abandonnés. Or la régulation tant européenne que mondiale devra être remise en perspective. L’alimentation n’est pas une marchandise comme les autres, et il est inacceptable que les denrées alimentaires soient cotées en bourse et fassent l’objet de spéculations.
Je citerai, moi aussi, l’élu écologiste François Dufour, ancien vice-président de la région Basse-Normandie en charge de l’agriculture – mon collègue Michel Le Scouarnec et moi avons les mêmes lectures et sources d’inspiration…