J'en viens aux questions de gouvernance. Il nous semble que maintenir la capacité pour l'État d'orienter la politique d'aide publique au développement est compatible avec le schéma de la section, à condition d'imaginer une nouvelle gouvernance.
Je rappelle que l'AFD est un outil de l'État, que ce soit par la tutelle qu'il exerce sur l'établissement, les modalités de nomination du directeur général ou la composition du conseil d'administration. La Caisse des dépôts est pour sa part placée « sous la surveillance et la garantie du Parlement », ce qui se reflète dans la composition de sa commission de surveillance où les parlementaires sont prépondérants. Son directeur général, nommé par décret, prête serment devant la commission.
Cette différence de gouvernance, conjuguée au fait que dans le schéma de la section, la gestion opérationnelle serait assurée par des personnels placés sous l'autorité du directeur général de la Caisse des dépôts, a pu faire naître la crainte d'un dessaisissement de l'État en matière de politique d'aide publique au développement.
Il semble cependant possible de surmonter ces difficultés en mettant en place, en s'inspirant notamment de l'exemple allemand, une gouvernance spécifique de la « section AFD », dans laquelle l'État continuerait à définir les orientations de la politique d'aide publique au développement et se prononcerait sur chaque projet, comme il le fait aujourd'hui à travers le conseil d'administration de l'AFD. Le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations aurait autorité sur les personnels chargés du montage et de la gestion opérationnelle des projets. Certes, cela impliquerait une évolution du modèle de la Caisse des dépôts et consignations, dans la mesure où l'État aurait un contrôle direct sur une de ses sections et où la commission de surveillance verrait ses prérogatives sur cette même section probablement plus limitées que pour la section générale.
Mais il nous semble que le modèle de la Caisse des dépôts et consignations se distingue avant tout par une addition de spécificités, fruit de l'histoire et d'un certain pragmatisme, qu'il s'agirait d'enrichir encore.
Se pose la question de la complexité de la mise en oeuvre du rapprochement. Le scenario de la mise en place d'une nouvelle section est le plus complexe, puisqu'il implique une perte de la personnalité morale pour l'AFD. Et il nous semble que mener de front le chantier de la hausse des engagements de l'AFD et celui du rapprochement de la Caisse des dépôts et consignations, notamment s'il prend la forme d'une section, peut sembler difficile sans moyens humains supplémentaires.
En conclusion, le débat semble s'être enfermé dans un schéma où chacun des trois scenarios ne permet de satisfaire que deux des objectifs, ce qui pourrait conduire à ne rien faire. C'est pour cela sans doute que le rapport de Rémy Rioux se limite essentiellement à proposer une gouvernance croisée, qui constituerait un pas certes bien modeste, mais orienté dans la bonne direction. Il semble cependant que ce pas ait été considéré comme excessif, le Gouvernement n'ayant finalement présenté aucune disposition en ce sens.
Pour notre part, nous considérons que le scenario de filialisation remet excessivement en cause le modèle financier de la Caisse des dépôts et ne permettrait pas de maximiser les synergies. Nous pourrions sortir de ce schéma bloquant en intégrant l'AFD à l'établissement public Caisse des dépôts et consignations, sous forme de section, à condition de mettre en place une gouvernance sui generis qui concilie, d'une part, la nécessité d'une direction opérationnelle par la Caisse des dépôts et par son directeur général avec, d'autre part, la nécessaire capacité de l'État à définir la politique d'APD et son cadre d'intervention, ainsi qu'à donner son accord sur chaque projet. Une étanchéité financière entre les deux entités devra également être assurée.