Intervention de Didier Mandelli

Commission mixte paritaire — Réunion du 6 avril 2016 à 18h00
Commission mixte paritaire sur la proposition de loi pour l'économie bleue

Photo de Didier MandelliDidier Mandelli, sénateur, rapporteur pour le Sénat :

Sur les 77 articles que contenait le texte transmis par l'Assemblée nationale, le Sénat en a adopté 37 conformes. Il en a ajouté 25. Il reste donc 65 articles en discussion. Lors de notre examen, dans un calendrier très contraint, nous nous sommes efforcés de conserver les grandes lignes de la proposition de loi. L'objectif partagé était de renforcer la compétitivité des activités maritimes. Aussi, nous avons conservé les principales mesures de ce texte, dont l'auto-liquidation de la TVA à l'importation dans les ports, qui a fait l'objet d'âpres débats avec le secrétaire d'État au budget - mais nous avons tenu bon et adopté le texte de l'Assemblée nationale. Le Gouvernement pourra toujours modifier ce point lors du vote du budget, mais l'essentiel est que nous ayons envoyé un signal fort alors que 50 % des biens à destination de la France sont débarqués dans un port étranger.

Le Sénat a également revu les modalités de gouvernance des ports en accordant davantage de poids aux grandes régions ou aux investisseurs privés. Il sera nécessaire de franchir une étape supplémentaire vers l'autonomie réelle des ports qui restent largement dans le giron de l'État - n'anticipons toutefois pas les travaux parlementaires en cours sur les grands axes portuaires.

Nous avons conservé l'esprit du netwage, même si nous avons finalement modifié le dispositif en adoptant une version proposée par le Gouvernement à l'issue d'un vote confus. Je ne doute pas que nous parviendrons à nous entendre lors de cette CMP. Il en va de même pour la responsabilité élargie du producteur (REP) navires dont l'entrée en vigueur est prévue pour 2018 et non 2017. Nous avons également plafonné la contribution à 0,5 % du prix de vente du navire - nous verrons s'il est opportun d'y revenir.

Nous avons beaucoup travaillé sur les jeux de hasard embarqués, véritable enjeu de compétitivité pour les ferries transmanche. La rédaction du Sénat me semble équilibrée.

Autre point important, l'obligation de capacité de transport des produits pétroliers, sur laquelle le décret paru récemment n'est pas conforme à l'esprit du mécanisme adopté dans la loi de transition énergétique. Nous devrions nous accorder sur une rédaction qui nous laisse conserver une flotte stratégique complète combinant petits et grands navires.

En matière de lutte contre le terrorisme, nous avons facilité le recours à des entreprises privées de protection des navires en supprimant la notion de zonage pour le recours à ces entreprises. Si cette notion peut être pertinente en matière de piraterie maritime, il n'en va pas de même pour la menace terroriste qui, par définition, ne s'inscrit pas dans une zone précise. Nous pourrons stabiliser ce dispositif dans le cadre de cette CMP.

Enfin, nous avons abordé des enjeux environnementaux importants. Nous avons ainsi interdit le rejet en mer des boues de dragage polluées à l'horizon 2020, reprenant un engagement du Grenelle de la mer. Nous avons également amorcé la transposition de la directive de 2014 relative au déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs en prévoyant des objectifs clairs pour la mise en place de systèmes de distribution de gaz naturel liquéfié et l'alimentation électrique à quai dans les ports - sujet important quand on connaît le niveau de la pollution de l'air dans les ports.

Il nous faudra sans doute revenir sur quelques sujets tels que l'extension brute du service minimum au transport maritime ou l'immatriculation au registre international français (RIF) de tous les navires de pêche outre-mer. Si je comprends leur objectif, ces dispositions nécessitent un travail juridique et une concertation plus approfondie en amont pour leur donner une réelle portée opérationnelle.

Pour le reste, nous nous sommes surtout attachés à améliorer les dispositifs proposés, notamment sur la simplification des procédures administratives ou la modernisation du droit du travail maritime. Nous avons aussi effectué un important travail sur l'extension outre-mer des dispositions et habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour actualiser les dispositions relatives aux espaces maritimes au regard de la convention de Montego Bay adoptée il y a près de trente-cinq ans.

Je salue le travail de Michel Le Scouarnec et de la commission des affaires économiques du Sénat, à laquelle nous avions délégué au fond l'examen des articles relatifs à la pêche. Les mesures proposées à ce sujet sont plus modestes et font l'objet d'un large consensus. Elles donnent des outils supplémentaires pour moderniser et développer ce secteur qui peine à décoller.

Je remercie enfin Arnaud Leroy d'avoir donné l'impulsion nécessaire à cette proposition de loi qui contient des mesures attendues par le monde maritime, parfois depuis plus de dix ans. Je le remercie aussi de la qualité de nos échanges.

Ces mesures réduiront le fossé de compétitivité qui nous sépare de nos concurrents. Quand les grandes puissances font le pari de la mer, nous avons l'obligation de poser une première pierre, avant de définir une véritable stratégie maritime portée par une vision politique ambitieuse en faveur de la croissance bleue.

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