Avant d'apporter quelques précisions d'ordre général, j'indique que le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
Les chiffres sont parfaitement clairs : en 2005, nous avons doté l'ANR de 700 millions d'euros en autorisations d'engagement ; en 2006, ce montant sera porté à 800 millions d'euros.
Les crédits de paiement, pour leur part, étaient de 350 millions d'euros en 2005. Ils seront en 2006 de 590 millions d'euros, soit une progression de 240 millions d'euros.
L'écart avec les chiffres que vous avez cités s'explique par la différence entre les crédits de paiement dont est dotée la nouvelle agence et ceux dont était doté l'ancien fonds national de la science, lesquels incluaient des opérations qui n'étaient pas conclues au moment de la création de l'ANR. Néanmoins, je confirme les chiffres qui ont été publiés.
Par ailleurs, l'activité de l'ANR est entièrement publique. L'ensemble de ses appels à projets sont publiés. Les résultats des travaux des commissions scientifiques qui choisissent les projets sont publics.
L'agence, qui ne fonctionne que depuis quelques mois - et c'était une gageure que de faire fonctionner aussi rapidement un tel organisme, qui compte seulement quarante collaborateurs permanents -, a réussi non seulement à lancer des appels à projets, mais encore, après avoir dépouillé 5 400 réponses, à arrêter son choix sur environ le quart d'entre eux, en constituant pour ce faire des commissions ad hoc. C'est une performance tout à fait remarquable.
L'agence a déjà publié un rapport d'activité et a présenté une information complète sur ses activités. C'est, à mes yeux, un véritable modèle en matière de mise en oeuvre d'une politique nouvelle que je vous demande aujourd'hui de confirmer par votre vote.
Pourquoi le Gouvernement s'oppose-t-il à l'amendement visant à ériger l'ANR en établissement public, son point de vue divergeant en cela de celui de la commission ? Tout simplement parce qu'une telle disposition n'est pas du domaine de la loi. En effet, l'article 34 de la Constitution dispose que la loi fixe les règles concernant « la création de catégories d'établissements publics ». Or le Conseil d'État a estimé - et nous partageons cette analyse - qu'il ne s'agissait pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics. C'est pourquoi nous considérons que la transformation de l'ANR en établissement public relève d'un décret et non d'une loi.
S'agissant du conseil scientifique ou du collège d'experts dont, respectivement, Mme Blandin et M. Bodin proposent de doter l'ANR, je tiens à rappeler que les grands établissements scientifiques français mènent des politiques en fonction de leurs spécialités dans les branches de la science qui font l'objet de leurs travaux. Dans le cas du CNRS, toutes les disciplines sont concernées.
L'ANR procédant par appels à projets, il ne faudrait pas que sa politique, dans tel ou tel champ, soit contraire à la politique conduite par un grand organisme de recherche. Prenons l'exemple de l'INRA, l'Institut national de la recherche agronomique. Imaginons que l'ANR lance des appels à projets qui ne soient pas conformes, voire qui soient contraires à la politique qui est suivie par cet établissement : vous seriez les premiers, mesdames, messieurs les sénateurs, à dénoncer l'incurie de l'État et son incapacité à assurer la cohérence des différents moyens d'action publique dont il dispose !
C'est pourquoi nous pensons que le Haut Conseil de la science et de la technologie doit apporter un éclairage général permettant au Gouvernement d'arrêter ses grandes priorités en matière de recherche. Des priorités plus précises seront ultérieurement définies, à la suite d'une discussion réunissant les organismes de recherche et les pouvoirs publics, sous le contrôle du Parlement.
Donner à l'ANR la possibilité de définir sa propre politique scientifique, ce serait vraiment prendre le risque d'une grave incohérence de la politique de recherche. L'État ne peut se le permettre s'agissant d'une politique aussi importante.
Nous considérons que l'ANR est une agence de gestion de procédures et qu'elle est en cela extrêmement utile. L'appel à projets tel qu'il est formalisé à l'ANR représente un progrès pour la recherche française. Il sera pour nous l'occasion de nous conformer aux standards internationaux, de nous rapprocher des procédures européennes et, partant, d'augmenter les chances de succès de nos équipes dans les appels à projets européens.
Aucune instance, quelle qu'elle soit, ne peut définir sa propre politique scientifique. Notre conception diffère donc totalement de celle qui est exprimée dans les amendements n° 109 et 110 rectifié.