Je m'aperçois que nous n'avons pas été totalement compris sur ce sujet qui est très important.
L'ANR sera-t-il un établissement public ? La réponse est évidemment oui. Je me suis borné tout à l'heure à indiquer que, au regard de l'article 34 de la Constitution, la création d'un établissement public était un acte de nature réglementaire. Le Gouvernement dotera l'ANR d'un statut d'établissement public dans les plus brefs délais, sans que cela affecte grandement son mode de fonctionnement.
Vous affirmez par ailleurs, monsieur Sueur, que l'argent qui ira à l'ANR sera autant d'argent qui n'ira pas aux organismes de recherche.
Situons d'abord les ordres de grandeur. Les programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur », la MIRES, pour ce qui concerne la recherche, représentent environ 10 milliards d'euros. S'agissant de l'ANR, il est question, annuellement, de 700 millions ou 800 millions d'euros en autorisations d'engagement. Autrement dit, ce n'est pas là que se trouve l'essentiel des moyens. Les budgets principaux sont inscrits au budget de l'État. Aujourd'hui, l'État, avec l'autorisation du Parlement, affecte des crédits à des organismes de recherche, à la recherche universitaire, en fonction de critères qui lui sont propres. S'il est décidé d'augmenter la dotation de tel organisme, c'est bien parce que l'on souhaite privilégier les recherches qui sont menées dans tel domaine par cet organisme.
Il y a donc bien une politique de la recherche, mais elle n'est pas toujours suffisamment explicite. Eh bien, nous proposons qu'elle soit demain plus explicite et plus claire pour l'ensemble de nos concitoyens et pour le Parlement.
Les sommes inscrites au budget de l'ANR sont distribuées selon des modalités qui sont différentes de celles que nous connaissons. Il ne s'agit pas de budgets classiques, étant précisé au passage que lesdits budgets classiques sont en augmentation. Il s'agit de crédits supplémentaires qui sont distribués à la suite d'appels à projets. Nous pensons en effet que l'appel à projets est stimulant pour les équipes de recherche et qu'il laisse une place à l'initiative. C'est tout l'intérêt des projets blancs, sur lesquels nous reviendrons à l'occasion de l'examen d'autres amendements.
L'ANR répartit ensuite ces crédits entre les organismes de recherche, tels que le CNRS, l'INSERM, l'INRA, ou les universités. Cela est d'ailleurs aisément vérifiable puisque l'ANR a d'ores et déjà attribué l'intégralité des crédits dont elle dispose pour l'exercice 2005. Si vous examinez la liste des destinataires de ces crédits, vous pourrez constater que, pour 80 % d'entre eux, ce sont des organismes publics de recherche, y compris les universités, et pour 20 %, des organismes privés, ce qui est au demeurant tout à fait légitime. Cet argent va donc à la recherche, et très majoritairement à la recherche publique.
Il n'y a pas d'évaporation des fonds. Ce sont des crédits supplémentaires qui participent de l'effort que nous consentons en faveur de la recherche.
J'espère avoir réussi à vous convaincre, monsieur Sueur, que, loin d'introduire de la complexité, nous clarifions les choses, nous fixons des orientations et aidons à identifier des priorités. À cet égard, le Haut Conseil sera utile et, grâce au Sénat, il figurera dans la loi. C'est donc un véritable progrès dans la lisibilité de la politique de recherche de notre pays que nous vous proposons.