Aucun village n'est organisé de la même façon, selon son histoire et la présence ou non d'une association qui gère le foncier. Cela dépend s'il s'agit de villages mono-ethniques ou pluriethniques.
J'ai réalisé un travail de terrain fouillé dans la commune d'Awala Yalimapo, une commune kali'na mono-ethnique située sur le littoral guyanais, à la frontière avec le Surinam. Le mélange des structures traditionnelles coutumières et municipales est une réussite. On trouve dans cette commune un chef coutumier et des structures municipales. Ceci est rendu possible par le fait que la communauté kali'na tient aussi les rênes de la municipalité. Le maire et tous les adjoints sont kali'na et ont créé un outil extrêmement original sous la forme d'une « commission mixte commune-communauté », qui règle les éventuels conflits à propos des questions relevant du foncier traditionnel. Le chef coutumier et les autorités municipales décident de concert qui a le droit de s'installer sur telle parcelle, de créer un abattis ou de construire une maison. C'est souvent le chef coutumier qui donne son aval et l'équipe municipale qui, en fonction des contraintes d'urbanisme, étudie si le souhait du demandeur est réalisable.
Dans les endroits où existe un foncier traditionnel, il appartient au chef de village, généralement le chef de famille qui a fondé le village, de donner l'autorisation de bâtir une maison ou un abattis. Demander au chef de ce village cette autorisation relève davantage de la courtoisie que de l'obligation juridique. Quand le village s'agrandit et que surviennent des nuisances sonores ou des conflits pour savoir qui va s'approprier temporairement tel ou tel lopin de terre pour créer un abattis, c'est souvent le chef de village qui est sollicité et qui rend un avis - que les gens ne voudront d'ailleurs pas forcément suivre. Si le conflit n'est pas résolu de cette façon, un autre village est créé plus loin par la personne qui n'a pas envie de se soumettre à l'autorité du chef coutumier, d'où l'importance de disposer de zones suffisamment vastes pour répondre à cette pratique.
Il existe d'autres cas où le pouvoir coutumier est supplanté par le président de l'association gestionnaire, souvent dans le cadre des concessions. Il peut y avoir aussi des conflits entre chef coutumier et association gestionnaire mais - au moins dans les cas que nous avons pu rencontrer - les choses se passent souvent plutôt bien.