Intervention de Dominique Garcia

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 27 avril 2016 à 10h05
Archéologie préventive — Audition conjointe

Dominique Garcia, président de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) :

Archéologue de formation et passionné par mon métier, je suis également professeur à l'université d'Aix-Marseille, à l'Institut universitaire de France, et ai été vice-président du CNRA durant plusieurs années ; j'ai ainsi instruit les dossiers d'agrément de sociétés privées et de services archéologiques de collectivités locales. J'ai présidé une commission qui a adopté, à une très large majorité, un livre blanc sur l'évaluation scientifique, économique et sociale de l'archéologie préventive, qui a nourri une première version du projet de loi.

Je suis fier de présider l'Inrap, principal acteur de l'archéologie préventive, qui réalise des diagnostics avec les collectivités territoriales et répond aux appels d'offre de fouilles en concurrence avec d'autres acteurs. L'archéologue produit ses propres archives dans la durée, contrairement à d'autres disciplines, mais pas pour contraindre l'aménagement du territoire. Depuis 2001 et 2003, la loi française a trouvé un équilibre entre la volonté d'aménager le territoire et la nécessité de préserver les données archéologiques, à la différence d'autres États où des problèmes environnementaux ou patrimoniaux peuvent bloquer la construction. En France, l'archéologue intervient préalablement sur des terrains qui seront ensuite construits, sans polémique entre les amoureux du patrimoine, les citoyens et les aménageurs. L'acquisition des données s'effectue de manière rigoureuse, scientifique, et n'a de sens qu'avec un cahier des charges précis, une collecte rigoureuse et la transmission des données à tous les chercheurs.

Les 2 000 collaborateurs de l'Inrap interviennent sur tout le territoire, parfois en concurrence avec des sociétés privés ou des collectivités territoriales - avec lesquelles ils collaborent également. Ils sont tenus d'intervenir dans des endroits difficiles où personne ne va, avant de libérer le terrain pour son aménagement. Ils publient plus de 600 articles scientifiques par an dans des revues nationales et internationales, récemment encore dans Science et Nature. Certains lieux ne comptent pas de théâtre ou de cinéma, mais les vestiges archéologiques sont partout. Lors des journées nationales de l'archéologie, au mois de juin, les archéologues partagent leurs données avec le grand public.

J'ai lu attentivement le rapport de la Cour des comptes : dans un contexte dérégulé - d'où la nécessité d'avoir une loi -, une économie dégradée pour tous, et un système concurrentiel extrêmement fort - alors que l'archéologie n'est pas une marchandise -, l'équilibre est difficile à trouver. La Cour souligne les progrès réalisés par l'Inrap mais regrette le manque d'évolutions, comme la réforme du régime indemnitaire et des frais de déplacement, et prône l'amélioration de la productivité ainsi que la réduction des coûts structurels via la révision de la carte des implantations de l'Inrap. En tant que président, c'est mon travail de moderniser notre gestion pour une bonne utilisation des derniers publics.

La qualité des données est essentielle pour le scientifique que je suis. La loi sur l'archéologie préventive a accru la production de données archéologiques de qualité, grâce à la transdisciplinarité, l'adaptation au terrain, l'échange avec les prescripteurs et la mise en place d'une direction scientifique de l'Inrap, intégrée dans des unités mixtes de recherche avec le CNRS et l'université.

La concurrence, le contexte économique dégradé, le manque de soutien de l'État ont porté atteinte à l'acquisition des données. Il faut réguler et pas seulement apaiser. La loi de 2001 et le principe d'archéologie préventive sont récents. Rétablir les équilibres dix ans après est normal. Tous les archéologues sont prêts à participer à ce nouveau travail, dans le cadre législatif, et en pleine conscience des équilibres économiques. L'archéologie exige des travaux de qualité et un contrôle scientifique et technique quotidien, dans l'intérêt de tous. Le renforcement du contrôle scientifique et technique est demandé par le président du CNRA, par tous les collaborateurs au livre blanc, par Mme Faure.

La recherche n'est pas qu'une question de vocabulaire. La recherche s'organise et se pilote ; tout le monde ne peut pas en faire ! Cela vaut pour chacun : il faut une programmation nationale, des liens avec les universités et le CNRS, et faire des choix. Notre discipline naissante doit augmenter sa recherche, et mieux organiser sa valorisation.

L'Inrap a adopté un nouveau contrat d'objectifs et de performance pour plus de rigueur dans l'acquisition des données, leur partage avec tous - dont les aménageurs - et la valorisation de la recherche.

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