Intervention de François Mercereau

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 29 mai 2007 : 2ème réunion
Evolution du périmètre de la protection sociale — Audition de M. François Mercereau directeur du pôle sanitaire du groupe korian

François Mercereau, directeur du pôle sanitaire du groupe Korian :

a tout d'abord présenté le groupe Korian qui résulte de la fusion, au mois d'octobre 2006, des sociétés Suren et Medidep. Ce groupe assure la gestion de 127 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et de cinquante établissements de soins de suite, de réadaptation et cliniques psychiatriques ; ses activités sont en forte croissance.

A son sens, les dépenses sociales ne présentent pas de particularité par rapport aux autres dépenses publiques et il est indispensable d'introduire de la rigueur et de la concurrence dans la gestion de ces dépenses. Par ailleurs, aucune présentation des comptes ne peut, à elle seule, suffire à régler un problème d'équilibre ; elle peut seulement clarifier le débat.

Sur la question du rôle des partenaires sociaux, des évolutions importantes ont eu lieu au cours des dernières années, notamment en 1996 et en 2004 pour l'assurance maladie. Pour la famille, les retraites et la branche recouvrement, l'Etat a toujours été l'élément décideur, les partenaires sociaux ayant un rôle consultatif ou de simple gestion administrative, c'est-à-dire le suivi du service des prestations et du recouvrement des cotisations. Ce rôle est utile, mais il conviendrait sans doute de le renforcer au niveau régional et de supprimer tous les échelons locaux inférieurs, qu'ils soient départementaux ou infradépartementaux. Il est en effet impératif de redéployer les moyens des caisses au niveau régional, voire au niveau de plusieurs régions.

A la Cnam, les partenaires sociaux ont essentiellement un rôle d'observation puisque, désormais, le directeur général a le pouvoir de décision, ce qui semble être une bonne évolution. Néanmoins, on constate que dans le cadre d'un paritarisme complet, comme tel est le cas pour les retraites complémentaires et l'assurance chômage, les partenaires sociaux assument très bien leur mission, car ils ont la totalité du pouvoir, aussi bien sur les dépenses que sur les recettes. On pourrait imaginer de transposer cette solution à la branche vieillesse dès lors que les dépenses de solidarité sont bien identifiées et isolées dans le cadre du fonds de solidarité vieillesse.

Puis M. François Mercereau a considéré indispensable de conserver le principe des droits acquis par le travail, en particulier pour les retraites. Ce lien apparaît toutefois aussi à travers la CSG. Aussi bien, se déclare-t-il opposé aux franchises sous condition de ressources, car cela concentre la recette sur un faible nombre de personnes, principalement les cadres. En revanche, une franchise par acte, non remboursée par les assurances complémentaires, même d'un très faible montant, présente un caractère civique utile.

Il pourrait également être intéressant de renforcer le lien entre cotisations et prestations en espèces, par exemple pour les indemnités journalières, en faisant comme pour l'assurance chômage, c'est-à-dire en les rendant proportionnelles à la durée de cotisation. En effet, la logique des indemnités journalières est d'être un revenu de remplacement, et non de substitution, pour lequel existent les minima sociaux. Ce raisonnement pourrait aussi s'appliquer aux prestations d'invalidité ainsi qu'à la retraite, en rapprochant les régimes de base de régimes à points, c'est-à-dire en rendant applicable le principe de proportionnalité.

a alors insisté sur le caractère inévitable de la fiscalisation des ressources de la sécurité sociale qui, d'ailleurs, ne fait plus l'objet d'un débat aujourd'hui, contrairement aux années qui ont précédé la mise en oeuvre de la CSG. L'intégration des cotisations patronales dans les salaires serait une bonne chose, car elle permettrait aux salariés de mieux percevoir le coût économique de la protection sociale. En ce qui concerne l'évolution de l'assiette des prélèvements sociaux, le rapport de référence est celui de Charles-Amédée de Courson et de Claire Bazy-Malaurie, publié en 1984, selon lequel l'utilisation de la TVA présenterait un faible avantage pour la plupart des entreprises et un intérêt très fort pour quelques secteurs bien ciblés comme l'industrie pétrolière ou les secteurs très capitalistiques.

Puis il a souligné le caractère paradoxal des transferts sociaux actuels, devenus des sortes de transferts à rebours. En effet, les retraités consomment actuellement 45 % des prestations sociales et le transfert des actifs vers les retraités s'élève à environ 50 milliards d'euros par an. Ce transfert serait acceptable s'il s'agissait uniquement de solidarité, mais, en réalité, il reflète une sous-cotisation des retraités dont les revenus sont supérieurs à ceux de nombreux actifs. On estime que sur les 50 milliards transférés, 30 sont justifiés et 20 s'apparentent à de la sous-cotisation des retraités, ce qui rend à l'évidence nécessaire une redistribution du prélèvement entre actifs et inactifs.

Pour les retraites, l'augmentation des cotisations est à son sens inéluctable, puisqu'entre 1995 et 2030, la part des retraités dans la population française doit passer de 16 % à 24 %. En augmentant de 0,1 % par an les cotisations, on peut régler un tiers du problème, mais il convient également de diminuer les droits et sans doute de sous-indexer les pensions de vieillesse.

En matière de dépendance, le coût d'un séjour en établissement est de 60 euros par jour en province et de 80 euros par jour à Paris, pour une durée moyenne de quinze mois. Au regard de cette somme, il est probable que deux tiers des Français peuvent épargner la ressource nécessaire. Mais cela signifie qu'il faut inciter les retraités à constituer cette épargne.

a ensuite fait observer que l'existence d'un comité d'alerte ne suffit pas à équilibrer des comptes en déficit et que, s'agissant de l'assurance maladie, il faut faire des économies et prendre des décisions importantes, même si elles sont difficiles. Parmi les pistes envisageables, on peut citer la mise en concurrence de la sécurité sociale et l'instauration d'une pluralité de gestionnaires qui, d'ailleurs, ne doivent pas forcément appartenir au secteur privé lucratif. Il en est de même pour les hôpitaux, pour qui il faut aller au bout de la mise en concurrence entre établissements publics et privés.

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