Je vais vous répondre sur la base de mon expérience d'ancien directeur d'ARH puis d'ARS. Ce que vous soulignez est exact. Toutefois, les ARH étaient les interlocuteurs uniques et exclusifs du monde hospitalier. Ce mode de fonctionnement a fait ses preuves et a donné satisfaction, notamment dans les relations avec les professionnels. Ces agences avaient en leur sein du personnel issu de la fonction publique hospitalière, ce qui facilitait la création de liens avec les acteurs de terrain. La création des ARS, dont l'hospitalisation n'est plus qu'une des missions, les a sans nul doute déroutés car ils avaient des partenaires clairement identifiés, dans une sphère spécifique. Le fait que l'hôpital ne constitue plus l'unique champ d'action de ces agences est, à mes yeux, à l'origine de ce ressenti. Les interlocuteurs ont pu changer lors de la constitution des ARS, les organigrammes ont parfois pu donner l'impression que le domaine hospitalier n'était plus mis en exergue comme auparavant.
Il faut également prendre en compte, dans ce constat, l'hétérogénéité des situations régionales. Parfois, dans les premiers temps, les préoccupations prioritaires des directeurs d'ARS étaient liées à leur origine professionnelle, à leurs connaissances ainsi qu'aux équipes qu'ils avaient recrutées. La compétence hospitalière s'est parfois amoindrie dans certaines agences, et les liens professionnels développés auparavant avec les agents de l'ARH ont pu disparaître, d'où les critiques que vous avez relayées.
Les directeurs d'ARS sont en contact permanent avec les établissements de santé dans le cadre d'un dialogue de gestion, afin de travailler à l'adaptation du fonctionnement et des financements ainsi qu'à l'amélioration de la qualité et à la diminution des risques. Ce n'est pas une tutelle au sens administratif du terme. Quant à la planification des soins, elle s'inscrit dans la lignée des anciens schémas régionaux d'organisation des soins (Sros). Ce n'est donc pas une nouveauté. La négociation qui conduit à la définition de ces schémas est très hétérogène et varie d'une région à une autre. Je ne pense donc pas qu'on puisse généraliser sur la base de critiques dénonçant un cas local.
Les médecins libéraux n'avaient pas l'habitude d'avoir face à eux une telle structure administrative. Ils traitaient auparavant avec les caisses primaires d'assurance maladie (Cpam) ou avec les préfets de questions comme la permanence des soins, qui relève désormais de l'ARS. Un accompagnement a été réalisé par les unions régionales des professionnels de santé (URPS), qui ont servi de point de contact. Une fois de plus, l'hétérogénéité des situations a pu avoir pour origine la méconnaissance des spécificités de l'organisation de la médecine libérale de la part de certains acteurs et la très grande différence de leurs cultures, suscitant des incompréhensions et ne facilitant pas le dialogue.