Intervention de Emmanuelle Cosse

Commission des affaires économiques — Réunion du 3 mai 2016 à 17h45
Politique du logement — Audition de Mme Emmanuelle Cosse ministre du logement et de l'habitat durable

Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable :

Je vous remercie de votre invitation pour vous présenter la politique que j'ai l'honneur de conduire. Afin de laisser le plus de temps possible aux questions, mon exposé sera bref.

Loi Alur, mobilisation du foncier public, simplification du droit : on ne peut pas dire que le logement et l'urbanisme aient été ignorés par le Gouvernement depuis 2012. Les objectifs que je poursuis sont ceux du quinquennat : d'abord, mettre en oeuvre un plan de relance de la construction et favoriser la création de logements à prix abordable, ce qui exige une politique du logement nationale mais territorialisée. Ensuite, engager une rénovation massive des logements, ce qui est autant un gisement d'activité économique que de pouvoir d'achat pour les ménages, et à quoi la loi relative à la transition énergétique s'est employée. Troisième objectif : réduire l'étalement - on devrait même dire l'éparpillement - urbain et l'artificialisation des sols, au moyen d'outils nouveaux favorisant un aménagement durable, comme les écoquartiers. Enfin, aider les ménages les plus fragiles en luttant contre le mal-logement, le saturnisme et l'insalubrité et en mettant en oeuvre dans tous les territoires le droit au logement opposable (Dalo) par une mobilisation de l'État et de tous les acteurs.

Vous avez mentionné un autre objectif important, monsieur le président : progresser dans l'application des lois. La loi Alur sera en effet appliquée à 85 % ou 90 % à la fin du premier semestre. Un certain nombre de décrets, pour l'heure à l'étude au Conseil d'État, seront pris en mai ou en juin. Certains articles du texte, comme celui relatif au carnet numérique du logement, posent d'importantes difficultés rédactionnelles et rendront sans doute indispensable une phase d'expérimentation.

Les chiffres de la construction, tant ceux des permis de construire délivrés que des mises en chantier, sont très encourageants, et ce dans tous les secteurs : maisons individuelles, logements collectifs, logements sociaux. Les contrastes sont toutefois forts entre les régions - entre l'Ile-de-France et les Hauts-de-France par exemple. En matière de rénovation, la reprise est plus lente.

Les nouveaux outils créés en matière d'urbanisme portent leurs fruits. Le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) est un succès : 300 sont en cours d'élaboration et 250 le seront bientôt. L'ingénierie foncière a été renforcée, au moyen des établissements publics fonciers (EPF), d'État ou locaux, et nous travaillons avec les nouvelles régions pour que dans les mois à venir, tous les territoires en soient dotés. Le réseau national des aménageurs regroupe, pour mieux les structurer, les aménageurs des secteurs public et privé. Contrats d'intérêt national en métropole, revitalisation des centres-bourgs en zone rurale : les nouveaux outils sont là. Des travaux restent à conduire sur certains territoires spécifiques comme les zones de montagne.

Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière, qui rassemble les professionnels de l'immobilier et les représentants des locataires, est opérationnel. Tous sont heureux de l'existence de cette instance, qui répond au besoin de modernisation d'une profession très touchée par le numérique et fournit un cadre de dialogue sur les dispositions restées conflictuelles de la loi Alur : bail type, encadrement des loyers, règles de majorité dans les copropriétés, etc.

Défendus naguère au Sénat par Claude Dilain, les outils destinés à remédier au problème des copropriétés dégradées, comme les opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national, sont des avancées majeures, à Clichy-sous-Bois et à Grigny comme en Provence-Alpes-Côte-D'azur et dans le Languedoc-Roussillon. La lutte contre l'habitat insalubre et les marchands de sommeil porte ses fruits, même si nous ne sommes pas arrivés à mettre un terme définitif à ces pratiques.

Le système national d'enregistrement de la demande de logement social est opérationnel. Il permettra de mieux connaître le profil des demandeurs - niveau de revenu, taille du ménage, etc. - ce qui est fondamental.

La garantie Visale, dans le cadre de notre partenariat avec Action logement, bénéficie aux ménages en situation de précarité.

Depuis 2012, les places pérennes d'hébergement augmentent, et des places spécifiques ont été créées pour les femmes victimes de violence. Dans le cadre du plan de réduction de la pauvreté, nous réduisons simultanément le nombre de nuitées hôtelières, qui ne permettent pas d'assurer un suivi social de qualité.

La mobilisation du foncier public, qui a connu une impulsion politique forte en 2015 grâce au rapport de Thierry Repentin, se poursuit : 71 terrains ont été cédés en 2015, et une centaine devrait l'être en 2016, avec une décote atteignant jusqu'à 100 % pour favoriser la réalisation de logements sociaux dans les communes carencées.

Le décret relatif au fonds national des aides à la pierre a été transmis au Conseil d'État la semaine dernière ; sa publication est prévue à la mi-juin. Les aides à la pierre seront grâce à lui sanctuarisées.

J'annoncerai plusieurs mesures dans les semaines à venir : l'octroi par la Caisse des dépôts de prêts de haut de bilan, financements en quasi-fonds propres qui aideront les bailleurs sociaux à réhabiliter des logements ; l'augmentation, dans le cadre du programme Habiter mieux, des objectifs et des crédits de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) destinés à la rénovation de logements pour les ménages modestes, qui passeront de 50 000 logements en 2015 à 70 000 en 2016 et à 100 000 en 2017 - sans préjudice du soutien à l'adaptation des logements ni du crédit d'impôt transition énergétique.

Les données SRU sont accessibles sur le site du ministère du logement depuis quinze jours, et seront actualisées tous les ans. Cela permettra d'encourager les communes à atteindre les objectifs fixés.

Un groupe de travail sur la pression foncière et la spéculation immobilière en Corse a été créé dans la perspective de la création d'une collectivité unique, afin que l'île bénéficie de toute l'ingénierie nécessaire. Un travail sera lancé sur le bassin minier ; un outil d'envergure nationale sera sans doute nécessaire, peut-être sous forme d'une opération d'intérêt national. Nous travaillons aussi sur l'aménagement du littoral, son adaptation à l'évolution du niveau de la mer, et l'indemnisation éventuelle des riverains qui en seraient victimes - vous connaissez le cas de l'immeuble Le Signal à Soulac-sur-Mer. Je pourrai également vous dire un mot, si vous le souhaitez, du plan d'accueil des migrants et réfugiés, qui relève budgétairement de mon ministère pour sa partie hébergement.

Le projet de loi Action Logement, voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale, clarifie la gouvernance de l'organisme et met fin à la concurrence entre les différents acteurs. Les fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction seront ainsi exclusivement mobilisés sur le logement. Il restera à préciser l'implication d'Action logement sur les territoires.

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