Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 3 mai 2016 à 15h15
République numérique — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

De même, il est choquant que l’éducation nationale ait passé contrat avec Microsoft sans appel d’offres.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que les Allemands ont désormais pris des dispositions pour que leurs données traitées restent sur le continent.

Une véritable prise de conscience doit donc s’opérer au sein de l’État français et de ses administrations. À cet égard, nous avons eu un débat extrêmement intéressant sur l’utilisation des logiciels libres.

Plus largement, il s’agit de ne pas favoriser les positions dominantes en choisissant, par défaut, de grands prestataires ou des solutions commerciales très répandues dans le cadre de marchés publics ou hors procédure. Je pense au moteur de recherche Qwant, acteur européen très innovant, respectueux de la vie privée et de notre législation en général, qui peine à émerger dans le parc informatique face au géant Google. Là encore, il s’agit pour la France et pour l’Europe d’avoir une ambition et une stratégie industrielle fortes.

La labellisation « French Tech » est positive, mais largement insuffisante.

Je ne me réjouis pas du rachat, voilà quelques jours, de Withings, fabricant d’objets connectés liés à la santé, par Nokia, c’est-à-dire Alcatel. Une fois de plus, et à défaut d’un schéma de développement français et européen du numérique, une de nos pépites nous échappe, et c’est encore un pilotage industriel et financier qui se fera depuis la Californie.

Dans ce contexte, pour que nos entreprises puissent assurer leur existence numérique, je suis satisfaite que certains de mes amendements aient été adoptés, notamment celui qui vise à donner une définition légale des moteurs de recherche, accompagnée d’un renforcement des pouvoirs de l’Autorité de la concurrence en cas d’abus de position dominante. Cette disposition ne va nullement à l’encontre des nécessaires initiatives européennes en cours, dont le cheminement, vous le savez, mes chers collègues, est toujours très long.

Ces questions sont essentielles, et ce sera ma conclusion. En effet, après le « web 3.0 » ou l’internet des objets, qui va contribuer à faire circuler toujours plus de données liées à nos vies et à nos infrastructures essentielles, arrive le « web 4.0 » ou « web généticiel », qui s’intéresse aux données de notre corps et de notre ADN. Il y a là de vraies interrogations sur le traitement spécifique de ces données, de même que sur le transhumanisme, l’intelligence artificielle ou la réalité augmentée appliquée à l’homme.

Comme l’a dit Joël de Rosnay, « l’Internet, c’est nous, en bien comme en mal ». Aussi prenons la peine de définir ce que nous considérons être les conditions et les critères du développement humain. Un texte comme celui-ci, qui est une somme de dispositions essentiellement techniques, doit s’inscrire dans une réflexion plus large sur la place réservée à l’homme et sur la construction d’un environnement propice à son épanouissement. La technologie pour la technologie et le progrès pour le progrès ne peuvent sous aucun prétexte être considérés comme des fins en soi.

La question du numérique devant également être appréhendée au niveau européen, c’est cette voix que la France doit porter, sans fatalisme, mais sans angélisme non plus.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, forts de ces réflexions, les élus du groupe UDI-UC voteront ce texte, dont nous partageons l’esprit et les objectifs. Il est certes perfectible, mais il a déjà été largement amélioré.

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