Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous recommande un ouvrage, les « 60 engagements » du candidat Hollande de 2012, trop méconnu. L’engagement 54 disposait : « Un pacte de confiance et de solidarité sera conclu entre l’État et les collectivités locales garantissant le niveau des dotations à leur niveau actuel. »
Deux ans plus tard, M. Valls arrive ; il annonce immédiatement une participation des collectivités territoriales à l’effort de redressement des comptes publics de 11 milliards d’euros et oublie toute pratique contractuelle. Même sous le gouvernement Jospin, une contractualisation, une discussion permettait de dégager un accord de mandature.
Tout cela est accompagné d’une campagne médiatique présentant les collectivités comme dépensières, laissant s’envoler leurs budgets, en particulier sociaux. En réalité, après avoir fait les poches des entreprises et des Français, il était urgent de faire celles des collectivités territoriales. Après le choc fiscal, le choc des reniements !
Aujourd’hui, la baisse drastique des dotations affecte fortement les budgets et conduit de nombreuses villes – mes chers collègues, j’en suis, pour ma part, à mon sixième mandat – soit à augmenter la fiscalité, soit à réduire considérablement leurs investissements, voire parfois à supprimer des services entiers.
Selon l’AMF, comme l’a rappelé brillamment son président, une nouvelle ponction de 3, 7 milliards d’euros nous conduira à 28 milliards d’euros cumulés de 2014 à 2017, prélevés sur nos ressources. Qui peut ignorer les effets néfastes, parfois tragiques, de ce phénomène sur l’économie des territoires et sur l’emploi de demain ? L’emploi local, lui, n’est pas délocalisable.
Même les magistrats de la Cour des comptes, souvent critiques, reconnaissent que la hausse de la masse salariale, reprochée si souvent aux élus, a été provoquée pour moitié par des mesures décidées à Paris.
Mes chers collègues, qui décide en effet la politique salariale de la fonction publique territoriale ? Qui annonce régulièrement des plans crèches ambitieux aux journaux télévisés ? Qui les réalise avec les normes drastiques qui nous sont imposées ? Qui organise la désertification des commissariats en banlieue ? Enfin, qui paye pour sauvegarder une sécurité à laquelle tout Français a droit, en mettant en place des polices municipales ?
Le poste « crèches » et le poste « sécurité » représentent 80°% des emplois créés ces cinq dernières années dans les collectivités territoriales.
Qui est responsable ? Qui ne l’est pas ?
Un léger espoir était apparu lorsque le groupe de travail sur la DGF – tous ceux d’entre vous qui en étaient membres se souviennent parfaitement de cet épisode – a rencontré pour la première fois M. le ministre chargé des collectivités territoriales. M. Baylet, benoîtement, nous a dit : « Je ne vois pas le Président de la République venir au congrès sans quelques annonces favorables aux communes ». Moment de grâce ! Le ministre semblait connaître les difficultés des élus à établir leurs budgets.
Mais dès le lendemain, le ministère du budget a démenti cette déclaration. Il rappelait les chiffres de l’exécution budgétaire dont il est le seul maître et précisait : « La situation des collectivités n’est pas si mauvaise », soulignant que leur capacité d’autofinancement « enflait ». Ce terme a toute son importance !
MM. Sapin et Eckert ont donc déduit instantanément que les collectivités pouvaient de nouveau subir le choc de la baisse de 3, 5 milliards d’euros supplémentaires de dotations en 2017 ! Ces déclarations sont à la hauteur de leurs performances dans le pilotage des finances publiques du pays. Pour se justifier, ils ont précisé que les dépenses de fonctionnement des collectivités augmentaient malgré la baisse des prix de l’énergie et des dotations. C’est peut-être vrai, mais entamer les possibilités d’investissement, dont tout le monde a expliqué l’intérêt pour l’économie de nos territoires, entraînerait un choc extrêmement important en contradiction avec le constat opéré par le ministre chargé des collectivités territoriales lui-même. Ce serait inquiétant !