Intervention de Patrick Lefas

Commission des affaires sociales — Réunion du 11 mai 2016 : 1ère réunion
Enquête de la cour des comptes sur l'adaptation aux besoins des moyens matériels et humains consacrés à l'imagerie médicale — Présentation par m. patrick lefas en présence de mme anne-marie armanteras-de saxcé directrice générale de l'offre de soins dgos

Patrick Lefas :

Notre diagnostic s'inscrit dans la nouvelle logique législative sur laquelle la Cour s'est appuyée pour construire ses recommandations. Je souhaite tout d'abord répondre à la question sur la lourdeur du système hospitalier, qui se pose d'ailleurs non seulement pour l'imagerie médicale mais également pour toutes les autres spécialités. Plus que cette lourdeur, toutes les personnes que nous avons auditionnées ont mis en avant le niveau de la rémunération qui doit être considéré à l'aune des contraintes d'astreinte et de lignes de garde que subissent les personnels.

Sur la problématique de la redondance des actes et donc de leur pertinence, M. Chasseing faisait référence à l'étude américaine citée dans le rapport et qui conclue que lorsque l'imagerie médicale est disponible dans un système d'archivage électronique (Pacs), on ne compte que 11 % d'examens répétitifs, alors que ce taux monte à 52 % lorsque l'imagerie médicale n'est pas accessible. Cette étude, menée sur un échantillon de 267 patients traités pour cancer du foie, doit être relativisée, car c'est la seule dont nous disposons. Elle montre toutefois qu'existe une corrélation entre la manière dont sont organisés les hôpitaux et la redondance des actes. Or, le parc d'imagerie médicale français étant assez jeune, il intègre des Pacs. Donc il n'y pas d'obstacle technique mais bien un problème d'organisation.

Le deuxième aspect qui me semble important de souligner, et que pointe d'ailleurs l'Autorité de sûreté nucléaire, est le risque d'un développement mal maîtrisé de l'imagerie médicale entraînant une forte exposition des patients aux radiations. Un scanner « corps entier » représente une dose de radiation de 20 mSv soit le niveau maximal annuel admis pour un travailleur exposé aux radiations. L'IRSN montre par ailleurs que la dose moyenne annuelle d'exposition aux rayonnements s'agissant de l'usage médical progresse nettement : de + 57 % entre 2002 et 2007 et de + 20 % entre 2007 et 2012 pour s'établir à 1,6 mSv. La France se situe dans le tiers supérieur de la moyenne européenne. Il y a donc un enjeu essentiel que l'on peut déjà commencer à traiter par le biais de l'organisation afin de diminuer la redondance des actes. Les médecins radiologues disent bien qu'il n'y a pas de prescription, mais une demande d'examen et que c'est à eux d'apprécier le besoin réel. J'insiste donc vraiment sur cet enjeu de l'amélioration de la pertinence des soins.

Sur les Sros, la France doit pouvoir faire mieux. Le rapport préconise que ces schémas soient plus incitatifs en étant encadrés par une exigence de contenu en matière d'imagerie médicale en ville et à l'hôpital. La mise en place d'un indicateur homogène de suivi des attentes vérifiable par les ARS serait très utile car il permettrait de ne plus dépendre de l'étude privée Imagerie Santé Avenir (ISA).

Une question a été posée concernant le recours à des structures situées à l'étranger, en particulier à Monaco et dans d'autres pays européens. Il existe en effet des situations où l'absence d'expertise sur place est compensée par le recours à des plates-formes éloignées à Monaco, en Espagne, parfois même en Inde pour les interprétations de nuit. Un jumelage avec Bangalore en Inde, par exemple, est assez pratique car le décalage horaire fait que les médecins peuvent travailler pendant les périodes de nuit en France. Or cela pose problème, car non seulement la lecture est un exercice difficile mais elle se fait en plus ici en anglais. La réponse que l'on peut opposer à ces externalisations aventureuses est la charte de téléradiologie, qui a été établie par la société française de téléradiologie. Elle distingue bien le télédiagnostic, basé sur la mise en réseau des cliniciens et des radiologues dans une logique territoriale partagée, de la télé-expertise, fondée sur la recherche pour le patient des meilleures ressources humaines radiologiques.

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