Intervention de Hélène Conway-Mouret

Réunion du 29 avril 2016 à 14h30
République numérique — Article 33 quater

Photo de Hélène Conway-MouretHélène Conway-Mouret :

Le présent projet de loi pose prioritairement le droit à internet pour tous et à un égal accès pour garantir l’insertion, la vie professionnelle et sociale. Aujourd’hui, pour toutes les générations, les liens passent aussi par les réseaux sociaux et la communication virtuelle. Ces nouveaux usages appellent de nouvelles règles pour prévenir – nous venons d’en discuter avec Roland Courteau il y a un instant – et combattre les risques qu’ils entraînent, à commencer par le développement des cyber-violences.

L’article 33 quater, qui a été ajouté à l’Assemblée nationale, concerne une forme particulière de cyber-violence : le revenge porn, c’est-à-dire, littéralement, la vengeance pornographique. Cette pratique consiste à diffuser, par dépit ou par vengeance, le plus souvent sur internet, des images intimes de son ex-compagne ou de son ex-compagnon sans l’accord de l’intéressé.

Je veux souligner la qualité du travail effectué sur ce point par la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale. Dans un rapport d’information, elle a dressé un état des lieux du phénomène, beaucoup moins marginal qu’il n’y paraît. J’en retiens particulièrement un chiffre, selon une enquête réalisée au mois d’avril 2014, en France, un homme sur dix n’exclurait pas de se livrer à de tels actes. Cette statistique est inquiétante ; elle démontre combien la gravité de ces faits est sous-estimée.

Le rapport met en lumière le désarroi des victimes, qui sont dans la très grande majorité des femmes et des jeunes filles, mais il s’agit parfois aussi d’hommes. Il donne aussi de précieux renseignements sur la complexité des procédures pour obtenir, notamment, le retrait des contenus diffusés sur internet sans le consentement des victimes.

L’article 33 quater vise à aggraver les peines susceptibles d’être prononcées à l’encontre de celles et de ceux qui se livrent à de tels agissements. Selon les dispositions en vigueur, en l’occurrence l’article 226–1 du code pénal, la peine pour toute atteinte à l’intimité de la vie privée est d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

Le présent article porte à deux ans d’emprisonnement et à 60 000 euros d’amende le fait de transmettre ou de diffuser sans le consentement exprès de la personne son image ou sa voix, prise dans un lieu public ou privé, dès lors que cela présente un caractère sexuel.

L’exposition de leur intimité à un large public pousse certaines victimes jusqu’au suicide. Nous ne pouvons pas rester insensibles à leur humiliation et à leur détresse. La confirmation de la pénalisation expresse des vengeances pornographiques est attendue par nos collègues de l’Assemblée nationale, mais aussi, bien plus largement, par nos concitoyens, que l’ampleur du phénomène inquiète.

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