Au reste, ce vocabulaire est peut-être mal choisi.
Sur la base des conclusions des travaux de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, l’ANDRA, et du débat public de 2013, plusieurs tentatives ont été faites ces dernières années, dans le cadre de différents véhicules législatifs, pour relancer le projet Cigéo. Je pense au projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte et au projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dit projet de loi Macron. Aucune de ces tentatives n’a abouti. C’est pourquoi nous devons nous réjouir que le Sénat prenne aujourd’hui l’initiative et qu’il assume ses responsabilités dans un dossier crucial.
Le sujet est indiscutablement des plus délicats, mais la proposition de loi apporte une réponse pragmatique aux enjeux auxquels nous sommes confrontés, pour le coup, sans réversibilité, puisque les Présidents de la République successifs et les différentes majorités parlementaires ont fait le choix du nucléaire ; l’existence de déchets est donc une donnée, et il faut bien les traiter.
Plus précisément, la proposition de loi apporte quatre modifications principales à la loi du 28 juin 2006 : la définition de la notion de réversibilité, le lancement d’une phase industrielle pilote qui marquera le début de l’exploitation industrielle du site, l’adaptation de la procédure d’autorisation et celle du calendrier initialement prévu en 2006.
En premier lieu, la proposition de loi définit la réversibilité comme « la capacité, pour les générations successives, à revenir sur des décisions prises lors de la mise en œuvre progressive d’un système de stockage ». En d’autres termes, la réversibilité doit permettre à tout moment de réévaluer les choix de gestion et, le cas échéant, de les adapter. Le dispositif prévoit que la mise en œuvre du principe de réversibilité fera l’objet de revues périodiques, au moins une tous les dix ans ; nous aurons l’occasion de revenir sur cette durée lors de l’examen des amendements.
En deuxième lieu, la proposition de loi prévoit, conformément aux attentes exprimées lors du débat public organisé en 2013, que l’exploitation du centre de stockage Cigéo débutera par une phase industrielle pilote, permettant notamment de conforter le caractère réversible et la démonstration de sûreté de l’installation au moyen d’un programme d’essais in situ. Les colis de déchets devront rester aisément récupérables durant cette première phase.
La phase pilote fera l’objet d’une autorisation de mise en service restreinte. L’autorisation de mise en service pour les phases ultérieures ne pourra être accordée qu’après la promulgation d’une loi élaborée sur la base d’un rapport de l’ANDRA exposant les résultats de la phase industrielle pilote. Vous voyez, mes chers collègues, qu’on ne propose pas au législateur de signer un chèque en blanc pour la poursuite du projet Cigéo ! D’autres échéances législatives sont prévues, et la phase pilote nous garantit simplement l’identification précoce des problèmes, ainsi que, évidemment, la réalisation des ajustements nécessaires.