Intervention de Christian Namy

Réunion du 17 mai 2016 à 14h30
Stockage réversible en couche géologique profonde des déchets radioactifs — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Christian NamyChristian Namy :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons cet après-midi et que nos collègues Gérard Longuet et Michel Raison ont déjà largement présentée constitue une adaptation de la loi du 28 juin 2006, après le débat public de 2013, sur lequel, du reste, les avis divergent.

Compte tenu des enjeux locaux, il est important que cette proposition de loi soit défendue par les deux sénateurs de la Meuse et soutenue par nos collègues de la Haute-Marne, ainsi que par vous tous. C’est à la fois un symbole de l’intérêt général porté à ce dossier et un signe que le territoire tout entier s’engage derrière le projet Cigéo, même si, aujourd’hui, nous ne disposons pas de toutes les réponses qui permettraient une adhésion totale de notre territoire.

Je ne reviendrai pas sur les aspects techniques du stockage réversible en couche géologique profonde des déchets radioactifs, ni sur la définition même de la réversibilité ; notre collègue Gérard Longuet en a parfaitement traité. Je soulignerai simplement que la réversibilité est une condition nécessaire pour laisser aux générations à venir la possibilité de faire des choix sur ces déchets. Être capable de faire des choix, laisser la possibilité de revenir sur ceux-ci ou bien de les conforter : c’est bien cela, le développement durable ; c’est s’inscrire dans le long terme sans jamais préjuger l’avenir.

Je souhaite également vous mettre en garde au sujet de la définition de la réversibilité. Il faut que celle-ci soit bien réelle, et non de façade. Je rejoins ainsi de nombreuses interrogations, qu’il faut savoir entendre.

Que l’on soit favorable ou non au développement de l’énergie nucléaire, ces déchets existent. Ils proviennent non seulement des centrales nucléaires, mais aussi de divers autres secteurs, notamment de la défense et de la santé. §En soi, nous pouvons être fiers de travailler au stockage de ces déchets, une opération qui nécessite des investissements importants pour les cent, voire cent cinquante années à venir.

La France, championne du nucléaire, doit être aussi la championne du retraitement et du stockage des déchets, d’autant qu’il s’agit de véritables filières économiques, que nous devons encore développer et conforter ; des milliers d’emplois industriels et de recherche sont concernés par ce secteur porteur pour notre pays.

Madame la secrétaire d’État, je regrette l’absence au banc du Gouvernement de la ministre chargée de l’énergie ; j’y vois une preuve supplémentaire de son désintérêt pour ce dossier. En revanche, compte tenu de mes propos à venir, votre présence devrait nous permettre d’obtenir des réponses aux questions liées au développement économique, en particulier à l’économie locale dans le département de la Meuse et son voisin. C’est sur cet aspect que je concentrerai la suite de mon intervention.

Les gouvernements successifs ont pris des engagements en matière d’accompagnement économique des territoires concernés par l’installation du centre de stockage des déchets. Cette contrepartie économique figurait même dans la loi Bataille de 1991. Il s’agissait alors de marquer la reconnaissance de la Nation pour les territoires participant aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs à haute activité à vie longue.

Or force est de constater que cet accompagnement économique, pourtant promis, est bien maigre. Je le regrette, nous le regrettons vivement.

Les différents acteurs – EDF, le CEA et Areva – s’étaient engagés à créer des emplois sur notre territoire, mais ils n’ont rien fait, ou du moins ils ne l’ont pas fait assez. Seule EDF tient en partie ses engagements. Au total, tout cela est bien insuffisant.

Gérard Longuet a rappelé tout à l’heure l’adhésion des départements de la Meuse et de la Haute-Marne à ce projet. Christian Bataille, dont je salue la fille, présente dans notre hémicycle, avait proposé un large soutien au développement économique local en accompagnement du projet.

Seulement voilà : aujourd’hui, le laboratoire de Bure fournit un peu moins de deux cents emplois, dont 40 % proviennent d’emplois locaux. C’est bien, mais largement inférieur à ce que l’on pourrait attendre.

Dans le cadre du comité de haut niveau installé en 2005 par Patrick Devedjian, alors ministre de l’industrie, les trois producteurs de déchets radioactifs se sont engagés en faveur du développement économique local, via l’accès des entreprises locales à leurs appels d’offres et le soutien aux projets économiques. Ils se sont également engagés en faveur du développement énergétique, par le biais du soutien aux projets des particuliers et des établissements publics pour la maîtrise de l’énergie et la valorisation de la filière biomasse. Je ne suis pas convaincu que toutes ces actions soient réellement mises en œuvre, alors qu’elles sont nécessaires à l’acceptation du projet d’enfouissement.

Pour progresser dans ce domaine, il me semblerait nécessaire de réunir ce fameux comité de haut niveau, afin de redéfinir les possibilités pour chacun de concrétiser cet accompagnement économique. En effet, ce comité, chargé de renforcer et de coordonner les efforts dans ce domaine, n’a pas été convoqué depuis plus de deux ans, malgré les demandes réitérées des élus nationaux des deux départements de la Meuse et de la Haute-Marne, et en dépit des différentes promesses que nous a faites la ministre Mme Ségolène Royal.

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