Nous considérons que le référendum prévu dans le projet de loi fragilise la démocratie sociale et nie la légitimité des organisations syndicales. Il permet en fait aux organisations syndicales minoritaires d'« utiliser » les salariés contre les organisations majoritaires non signataires, lesquelles peuvent représenter de 70 % à 90 % des salariés. Il accentuera aussi les oppositions entre les catégories de salariés qui n'ont pas forcément les mêmes intérêts. Nous en avons eu un exemple chez Smart, où le référendum a donné lieu à des divergences entre les cadres, qui avaient approuvé la mesure proposée à 74 %, et les ouvriers, dont seuls 39 % étaient pour.
On ne peut pas, à la fois, dans la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, prétendre donner une légitimité aux organisations syndicales au travers des élections professionnelles, et les fragiliser via un référendum qui les délégitime aux yeux des salariés. C'est un contresens et un recul social !
En outre, compte tenu de sa lourdeur, le référendum ne permet pas d'apporter une réponse rapide. Or il doit être mis en oeuvre dans des situations sociales difficiles. Les accords dérogatoires en matière de négociation annuelle obligatoire (NAO) seront également soumis à cette procédure, ce qui risque d'entraîner des difficultés. Du coup, les organisations majoritaires verront leur droit d'opposition disparaître. Quelle est la légitimité de ce mode de validation des accords ?
Pour ce qui concerne les règles de révision des accords, le principe retenu par le Gouvernement permettra aux entreprises de revenir plus facilement sur les droits conventionnels des salariés, à tous les niveaux, ce qui fragilisera lesdits droits. Nous étions favorables à l'engagement de la révision, à condition que soit maintenue la règle de l'unanimité des organisations syndicales signataires de l'accord d'entreprise, et que soit prévu un assouplissement pour la conclusion d'un avenant de révision. En matière d'avantages individuels acquis, un certain nombre de droits vont disparaître : jours de congés supplémentaires, avantages conventionnels en argent, sursalaire familial...
Le texte fragilise également les NAO, alors que la loi Rebsamen avait permis que leur périodicité soit négociée au sein de l'entreprise. Le projet de loi ajoute la possibilité d'y procéder par accord de branche.
La structuration des branches représente également un sujet important. Malgré une lettre paritaire des organisations syndicales et patronales sur cette question, le Gouvernement souhaite aller vite et remet en cause un certain nombre de dispositions de la loi Rebsamen.
En conclusion, la place de la négociation collective et des organisations syndicales est très fortement remise en cause par ce projet de loi. Recours au référendum, négociation facilitée au travers du mandatement, assouplissement des règles de révision, réduction des avantages individuels acquis, mais aussi, sur la philosophie même du texte, inversion de la hiérarchie des normes et remise en cause du principe de faveur, la liste est longue des points qui nous poussent à demander le retrait de ce texte.