Intervention de Dominique Bureau

Commission d'enquête Chiffres du chômage — Réunion du 11 mai 2016 à 14h35
Audition de M. Dominique Bureau président de l'autorité de la statistique publique asp

Dominique Bureau, président de l'Autorité de la statistique publique (ASP) :

Le bug SFR, qui a eu lieu en août 2013, est au coeur du rapport des trois inspections, qui a préparé la labellisation des statistiques des DEFM, qui recommande notamment la création de cellules de crise. Le collège des neuf membres de l'ASP délibère sur la base d'auditions, dans une logique juridictionnelle, à l'instar d'autres autorités indépendantes. Nos propres services d'instruction sont limités à un cadre A de l'Insee. Nos capacités directes sont faibles mais nous pouvons mobiliser des corps existants. Il existe une inspection générale à l'Insee.

Nous sommes souvent écoutés. Ainsi, notre demande de supprimer le statut de SSM au bureau des statistiques de la pêche et de l'aquaculture, qui n'atteignait pas la masse critique, a été suivie d'effet. Nous avions déploré les ruptures d'embargo dans la publication des chiffres d'activité économique via les enquêtes trimestrielles de l'Insee. Dans la statistique publique, chacun doit avoir accès aux informations en même temps. Bien sûr, le ministre de l'économie sait avec quelques heures d'avance quelle sera l'évolution de l'IPI ou du PIB, pour pouvoir répondre aux questions des journalistes et préparer sa communication. C'est une tradition française admise par tous, et non choquante, si elle suit des règles claires. Mais il n'est pas question que ces chiffres alimentent les spéculations ; la statistique doit informer. Ainsi, nous avons supprimé l'accès personnel à ces chiffres au cabinet du Président de la République. Cela évite d'en parler lors des dîners en ville ! À chaque recommandation, nous avons été suivis.

Comme autorité indépendante, nous avons des méthodes de contrôle spécifiques, fondées sur la confrontation, et différentes de celles des inspections générales. Nos sujets sont plus ou moins importants. Nos moyens sont limités mais proportionnés à notre mission, afin qu'elle soit réalisée en toute indépendance. Nous sommes sollicités en cas de problème dans un service : établir un chiffre en toute indépendance, comme dans le cas du bug SFR, était au coeur des préoccupations du rapport des trois inspections. Ce n'est pas une remontée à l'aveugle ! Il faut s'assurer que le chiffre soit pertinent.

Les différentes catégories de demandeurs d'emploi ont changé en 2009 et ont été incluses dans la labellisation. En cas de changement sur une série que nous avions validée, nous devrions redonner un avis, de même que le comité du label sur une autre série. Peut-on jouer d'une catégorie sur l'autre ? Le mensonge serait compliqué à prolonger plus d'un mois. Je n'ai eu aucune remontée de tricherie. En mai 2015, un problème sur le processus de rappel avait été constaté : en raison des nombreux ponts, le taux de réinscription était particulièrement bas. Un rappel supplémentaire a abouti à l'excès inverse, à savoir un taux anormalement haut de réinscription. Les services nous ont immédiatement informés. Le rappel supplémentaire a été un choix discrétionnaire - heureux ou malheureux - mais pas une volonté de tricher dans un sens ou dans l'autre. Il faut donc limiter la part discrétionnaire pour anticiper au maximum les changements. En général, les séries longues les neutralisent. L'examen par les pairs n'a pas révélé de défaillance ; le système français est plutôt en avance.

Le fonctionnement du marché du travail est intrinsèquement compliqué. Longtemps, on a considéré qu'on pouvait établir un bon chiffre du chômage, à partir de l'enquête Insee trimestrielle et de l'enquête DEFM mensuelle qui, recalées, donnaient un chiffre mensuel. Mais la première établit comment les sondés se situent sur le marché de l'emploi, tandis que la seconde ne mesure que les réinscriptions à Pôle emploi. Comment définir une personne sans emploi ? Que signifie chercher un emploi ? Je me suis intéressé au sujet lorsque j'étais chef du bureau de la politique économique à Bercy entre 1986 et 1988 et dans le cadre des rapports Malinvaud et Bourguignon à la fin des années 1990. Désormais, la vision repose sur plusieurs chiffres, obtenus par des mesures différentes.

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