Intervention de Olivier Schrameck

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 17 mai 2016 à 14h30
Rapport d'activité du csa pour 2015 — Audition de M. Olivier Schrameck président du conseil supérieur de l'audiovisuel

Olivier Schrameck, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous retrouver pour ce rendez-vous annuel fixé par le législateur lui-même.

Le rapport d'activité annuel du CSA représente l'épine dorsale des relations entretenues, toute l'année durant, entre le CSA et les assemblées parlementaires. Ces relations se nourrissent aussi de la remise de rapports, tel celui consacré, l'an dernier, à la radio numérique terrestre ou encore le rapport annuel, qui vous sera transmis cette semaine, sur la diversité et la cohésion sociale dans la société française. À ces rapports s'ajoutent les auditions par les parlementaires : dix-sept auditions se sont tenues en 2015, parmi lesquelles sept ont eu lieu au Sénat, dont quatre devant votre commission.

Nous avons en effet vocation tant à rendre compte de nos travaux aux assemblées parlementaires et à leurs commissions qu'à nous mettre au service du public en notre qualité de régulateur indépendant.

Nous l'avons fait, aidés en cela par des sollicitations toujours plus nombreuses. Nous recevons environ 1 000 plaintes chaque mois, tant par le biais des réseaux sociaux que sur notre site internet. Celui-ci est toujours plus visité : 10 000 pages sont vues chaque jour, 900 000 visites ont été relevées l'an dernier. Ce site fournit aux usagers des applications à intérêt pratique, telles que « Ma couverture TNT » et « Ma radio FM ». En outre, les auditions publiques auxquelles nous procédons y sont retransmises systématiquement. Enfin, nous y mettons à disposition du public des publications très variées sur des sujets concrets, de l'arrivée de Netflix jusqu'à l'importance de la Coupe du monde de rugby dans la diffusion sportive.

Nous sommes attachés à l'éducation du public aux médias. Un site internet renouvelé, « Clés pour l'audiovisuel », a été créé à cette fin en septembre dernier ; il a vocation à s'enrichir encore considérablement.

La diversité de la société française fait quant à elle l'objet de beaucoup de manifestations. J'ai personnellement formulé des demandes de programmations renforcées et pluriannuelles à ce sujet lors de réunions avec l'ensemble des éditeurs. Des messages ont été diffusés à l'occasion de la Fête nationale et un colloque annuel s'est réuni. Il faut relever que les radios se sont engagées dans ce mouvement de leur propre initiative, dans l'esprit de régulation volontaire auquel nous sommes très attachés.

Nous encourageons aussi la promotion de la langue française, qui a fait l'objet de deux journées, en mars 2015 et mars 2016.

De même, nous avons mené des campagnes pour une meilleure protection des mineurs : il s'agit notamment d'éviter que les enfants de moins de trois ans soient exposés aux images, ce qui peut entraîner chez eux des perturbations psychologiques.

C'est un exercice quelque peu artificiel que de condenser en un bref exposé l'activité multiforme du CSA, dont quelques chiffres peuvent illustrer l'ampleur : 68 collèges tenus tout au long de l'année, 1 200 dossiers examinés, 115 auditions publiques - nous allons ainsi entendre prochainement les dirigeants de SFR et les quatre responsables de l'audiovisuel public -, 39 rapports élaborés.

Nous entendons être un régulateur proche des opérateurs. L'organigramme du CSA a été réformé l'an dernier, pour la première fois depuis 2005. Nous avons à cette occasion créé des structures supports à destination de ces acteurs, en particulier des guichets uniques pour les webtélévisions et les webradios. Nous avons aussi créé un secrétariat général aux territoires, qui a pour vocation de coordonner et d'animer l'action des comités territoriaux de l'audiovisuel, ou CTA, auxquels nous donnons de plus en plus de compétences : nous avons notamment supprimé la deuxième délibération par le CSA des décisions prises par les CTA. Nous allons progressivement leur confier, en partie, le contrôle des télévisions locales.

Nous sommes proches des acteurs également sur des problèmes plus délicats. Je pense au travail que nous avons mené à la suite des attentats de l'an dernier : si les attaques de janvier 2015 ont donné lieu à des problèmes et des anomalies, le constat est en revanche très positif quant au travail des rédactions autour des événements tragiques de novembre 2015 et du foisonnement constaté à cette occasion sur les réseaux sociaux.

Deux problèmes subsistent néanmoins. Il faudrait, si un drame similaire devait, hélas, survenir à nouveau, que des cellules de crise soient rapidement constituées, réunissant représentants des ministères concernés et du CSA, en cas de besoin. Il faut également renforcer le contrôle de certaines chaînes satellitaires qui émettent depuis des pays frappés par les secousses du terrorisme.

Nous restons également attentifs au pluralisme et à l'indépendance des médias, sujet qui vous tient à coeur, comme en témoignent les récentes propositions de loi sur ce sujet. Certes, nous ne souhaitons ni intervenir dans la vie interne des sociétés d'audiovisuel ni réguler ex ante. Toutefois, nous tenons à encourager toutes les formes possibles d'autorégulation et en particulier, pour reprendre le terme présent dans la législation proposée, les comités de déontologie. Le CSA a d'ailleurs été à l'initiative de la création de tels comités dans plusieurs chaînes d'information en continu.

Nous entendons aussi être un régulateur présent au coeur des mutations du secteur audiovisuel. Nous tirons à cet égard le bilan du transfert de la bande 700 MHz. En dépit de nos inquiétudes, ce transfert a été un succès, comme en témoigne le relatif silence médiatique à ce sujet, à l'exception de quelques cas.

Ce transfert représentait trois opérations en une : le changement de norme de compression ; la restructuration des multiplex en Île-de-France et dans certains territoires avoisinants ; enfin l'offre, dans la région Rhône-Alpes, de six nouvelles chaînes TNT en haute définition. En Île-de-France, 99,99 % des foyers ont bénéficié de ce basculement ; en Rhône-Alpes, 97 %. Ces changements ont d'ailleurs pu bénéficier à d'autres chaînes : en entraînant une remise en ordre de l'étalonnage, ils ont donné à certains téléspectateurs l'occasion de découvrir des chaînes déjà diffusées, mais jusqu'alors méconnues.

Nous avions manifesté notre inquiétude sur ce sujet à plusieurs reprises. Je tiens à cet égard à exprimer ma gratitude envers votre commission et envers vous en particulier, madame la présidente, pour avoir écouté et relayé nos préoccupations, notamment sur les sujets de l'indemnisation des diffuseurs et du calendrier, prégnants jusqu'au dernier jour. Quant aux campagnes d'information, nous y avons beaucoup contribué, dans la discrétion, en collaboration avec les chaînes. Les élus et les préfets ont également été tenus informés par nos soins. Enfin, lors du transfert même, nous avions mis en place au CSA un quartier général qui a fonctionné jour et nuit. Tout cela peut expliquer la réussite du transfert des fréquences.

Vous avez cité, madame la présidente, un problème spécifique rencontré par certains foyers à l'occasion de ce transfert. Il se peut en effet que certains récepteurs très anciens n'aient pu bénéficier du cordon qui devait être acquis. L'Agence nationale des fréquences, qui gérait le central téléphonique, a reçu la teneur de ces cas extrêmement rares, bien moins fréquents en tout cas que les problèmes survenus lors du passage de la télévision analogique à la TNT.

J'en viens au sujet de la structuration des opérateurs. Vous avez évoqué à ce propos, madame la présidente, l'attribution gratuite d'une ressource rare à la chaîne Numéro 23 dans le cadre du spectre hertzien. Nous avons toujours eu dans cette affaire le souci d'éviter que le domaine public constitué par les fréquences hertziennes soit utilisé d'une manière assimilable à des finalités spéculatives ; ce domaine public gratuit doit en effet être protégé et faire l'objet d'une saine gestion.

À la suite de la décision du Conseil d'État, un accord a très rapidement été conclu avec le groupe NextRadioTV, désormais allié à Altice, pour un transfert de la chaîne ; la somme est moindre, mais elle reste importante. Nous examinons désormais les possibilités offertes par l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986. Il est plausible que d'autres étapes soient franchies. Nous restons dans tous les cas attentifs à la qualité de la programmation future de cette chaîne, source de diversification des services aux téléspectateurs.

La structuration du paysage audiovisuel donne lieu à d'autres problèmes et à des décisions du CSA relatives aux chaînes d'information en continu. Je pense d'abord à l'octroi de la gratuité à LCI, à la demande de la chaîne, à compter du 5 avril dernier, sur le canal 26. Il ne m'appartient pas de commenter au premier chef les résultats de cette chaîne. Néanmoins, grâce aux chiffres de l'institut Médiamétrie, nous constatons un rebond de son audience, estimé entre 0,1 % et 0,3 %.

Ce rebond ne remet pas en cause les résultats des autres chaînes. En effet, on ne constate qu'un léger tassement de BFM TV, peut-être dû à un contexte d'actualité moins dense et moins tragique que dans les mois précédents ; son audience sur plusieurs mois reste stable, autour de 1,8 %. Quant à iTélé, sa part de marché s'établit à 1 %, soit une hausse de 0,1 point par rapport au mois précédent.

À propos d'iTélé, vous aurez relevé dans la presse, mesdames, messieurs les sénateurs, les débats relatifs à son avenir. Je rencontrerai aujourd'hui même M. Vincent Bolloré pour en discuter.

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