Intervention de Christian Eckert

Réunion du 18 mai 2016 à 14h30
Protection du crédit immobilier français — Adoption d'une proposition de résolution

Christian Eckert, secrétaire d’État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je serais bref, car beaucoup de choses ont déjà été bien dites et beaucoup d’idées exprimées sont largement partagées entre vous ainsi que, pour la plupart, par le Gouvernement.

Nous discutons aujourd’hui d’une proposition de résolution que vous avez déposée en avril dernier.

Cette résolution souligne à juste titre les atouts du modèle français du financement de l’habitat. Ce modèle repose sur une politique d’octroi des prêts qui est fondée sur la solvabilité des emprunteurs, sur la prévalence des prêts à taux fixe, ainsi que sur un recours majoritaire à la caution. Comme le soutient à juste titre cette résolution, il ne serait pas acceptable que ces atouts soient remis en cause par un calibrage inadapté des exigences décidées par le comité de Bâle.

Souvent mal comprises à l’étranger, les particularités du système français ont fortement contribué à assurer la robustesse de notre modèle. Les chiffres de la sinistralité en sont un bon témoin. La France est le pays en Europe qui présente le taux d’impayés le plus faible sur les prêts immobiliers en 2014 : cinq fois plus faible qu’en Allemagne, et près de quinze fois plus faible qu’au Royaume-Uni, en Espagne ou en Italie.

Ce constat est appuyé par les conclusions du Haut Conseil de stabilité financière, qui a mené une analyse particulière sur ce sujet dans son dernier rapport annuel.

Le modèle français du financement de l’habitat présente ainsi des atouts indiscutables qu’il convient de préserver dans le cadre des évolutions prudentielles envisagées. Dans les travaux internationaux en cours, c’est bien cette position qui est soutenue.

Des travaux engagés au sein du comité de Bâle ont fait l’objet de consultations publiques. Certains d’entre vous, au début de la discussion générale, ont parlé d’opacité. En me gardant de tout excès, je rappelle néanmoins qu’avant de mettre au point de nouveaux standards, le comité de Bâle publie des documents de consultation, lesquels sont ouverts aux commentaires de toutes les parties prenantes. M. Francis Delattre y a d’ailleurs fait précisément référence. Des documents de consultation relatifs, notamment, au risque de taux et au risque de crédit ont ainsi été produits.

Ces travaux bâlois s’inscrivent dans une perspective de préservation de la stabilité financière. Ils ne visent pas à dissuader, voire à interdire, des pratiques établies, comme la fourniture de prêts à taux fixes ou le cautionnement, mais bien à améliorer la mesure du risque au sein du portefeuille bancaire, afin de s’assurer que les établissements disposent de suffisamment de fonds propres pour y faire face.

Les consultations qui ont eu lieu visaient d’ailleurs à offrir aux parties prenantes la possibilité de réagir aux propositions du comité et de proposer des approches alternatives là où elles l’estiment nécessaire. Ces travaux devraient aboutir, à la fin de 2016, à la publication d’amendements au standard Bâle III, qui pourraient ensuite être déclinés dans le corpus réglementaire européen.

Nous souhaitons donc, comme vous, que le calibrage final des réformes bâloises, qui devrait être défini d’ici à la fin de l’année, soit ajusté en fonction des résultats de l’ensemble des études d’impact, quantitatives comme qualitatives – vous en avez rappelé la nécessité –, afin de préserver ces atouts. Nous y travaillons !

Dans le cadre des négociations de la transposition des règles bâloises dans le droit européen, soyez assurés que le Gouvernement, qui vous a entendus, sera particulièrement attentif à ce que les spécificités du modèle français de financement de l’habitat soient correctement prises en compte de façon à en préserver les atouts.

Le Gouvernement veillera également à ce que l’impact de ces nouveaux standards sur les exigences en fonds propres des banques françaises soit maîtrisé, conformément aux conclusions des ministres des finances du G20. Ces derniers ont en effet lancé un appel pour que les travaux en cours ne conduisent pas à une augmentation significative des fonds propres par rapport à ce qui a déjà été acté lors de la négociation du paquet Bâle III.

Les colégislateurs européens, lors de l’inscription des standards dans le droit européen, pourront d’ailleurs en dévier, ce qui n’est pas forcément souhaitable. Cela a déjà été fait dans le passé, afin de tenir compte des spécificités européennes, ainsi que M. Michel Canevet l’a rappelé.

Vous avez compris que le Gouvernement a bien entendu les différents messages contenus dans cette proposition de résolution et, comme vous l’avez demandé, il pèsera de tout son poids politique pour faire en sorte que vos préoccupations légitimes, allant dans le sens de l’intérêt général économique et social soit parfaitement prises en compte.

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