Bonjour à tous. Je suis désolé que Nina Belile ait eu une expérience aussi négative du permis de conduire, et ait si mal vécu son apprentissage. Il existe des vérités et des réalités intéressantes dans ce témoignage.
Je souhaite tout d'abord préciser que l'examen du permis de conduire n'empêche pas les accidents de la route. Toutes les statistiques démontrent qu'un conducteur se révèle particulièrement dangereux un an après l'obtention du permis. C'est pourquoi certains pays nordiques ont instauré un suivi pendant l'année qui suit l'examen. La France s'en inspire en proposant le CECUR, « Continuum éducatif du citoyen usager de la route », qui obligera le jeune conducteur à revenir après son permis pour des rendez-vous pédagogiques lui permettant d'échanger avec des professionnels.
Concernant les stéréotypes sexistes, ils sont sans doute plus répandus en Ile-de-France que dans le Var, où j'exerce mon activité. Je n'ai jamais entendu la phrase « femme au volant, mort au tournant ». Les formateurs que je connais traitent de manière parfaitement égale les hommes et les femmes candidats au permis de conduire. Pour le CNPA, souligner une différence entre les hommes et les femmes lors de cet examen équivaudrait à un affront fait aux femmes. L'inspecteur valide seulement des compétences et la gestion du partage de la route avec les autres usagers.
D'après les chiffres, il semblerait que les femmes obtiennent plus difficilement leur permis de conduire que les hommes. Pourtant, j'ai l'impression que la société a fortement évolué. Ma mère considérait l'obtention du permis pour les femmes comme une libération. De nos jours, la situation est différente. De fait, je constate que ma fille conduit plus souvent que mon fils. Lors des rendez-vous pédagogiques avec les parents et les jeunes, nous constatons un changement réel de génération, même si, effectivement, les hommes arrivent sans doute avec plus d'assurance que les femmes le jour de l'examen, et sont peut-être plus à l'aise au niveau mécanique.
Concernant l'épreuve du permis de conduire, il est inutile à mon avis de changer totalement le dispositif. Les compétences doivent être validées de manière identique pour tous. Nous devons défendre le permis de conduire, qu'il ne faut pas considérer comme un bien de consommation. Le nom officiel des moniteurs a été changé pour : « enseignant de la conduite automobile et de la sécurité routière ». Apprendre à conduire avec plusieurs enseignants est un avantage et non un inconvénient : les méthodes pédagogiques diffèrent selon chaque formateur, certains disposent de compétences plus spécifiques dans un domaine... De même, les jeunes ne peuvent pas choisir les heures des cours de conduite puisqu'ils doivent savoir conduire pendant toutes les plages horaires de la circulation.
L'enseignement de la conduite a été desservi pendant longtemps par son coût, jugé trop cher. Il s'agit d'une réalité indéniable. Malheureusement, si le coût est réduit, les dérives se multiplieront. Il existe déjà des plateformes louant des véhicules avec des formateurs dépourvus de qualification. C'est pourquoi il est essentiel de maintenir un excellent niveau de qualité des enseignants et de développer une charte de qualité pour établir une normalisation des formations. Les exemples cités par Nina Belile révèlent des comportements inadmissibles pour des enseignants. Je n'ai jamais rencontré de formateurs coupables de ce type de fautes dans le Var. Il me semble que la majorité des enseignants choisissent ce métier par goût. Ils transmettent des notions et pratiques essentielles pour assurer la sécurité de tous sur la route.
Il existe une obligation de formation pour les exploitants, tous les cinq ans, ainsi que pour les enseignants de la conduite, à qui est proposé un catalogue de formation continue. Ces derniers doivent également se former à des publics spécifiques : pré-permis dans le domaine scolaire, post-permis chez les seniors.
Le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social vient de publier un arrêté sur le diplôme des enseignants de la conduite. Pour donner des cours de conduite, il fallait auparavant détenir le Brevet pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite automobile et de la sécurité routière (BEPECASER). L'arrêté change désormais ce diplôme en un titre professionnel et le niveau des enseignants passe du niveau baccalauréat au niveau IV. Ce certificat de qualification professionnel mettra l'accent sur la réflexion et la pédagogie indispensables aux formateurs. Avec ce nouveau diplôme, les enseignants, mieux payés, disposeront de compétences supplémentaires. En parallèle, une démarche qualité est développée pour les écoles de conduite. L'objectif serait que les candidats puissent choisir l'auto-école dans laquelle ils s'inscrivent en fonction de la qualité des enseignements dispensés et des résultats. Il ne s'agirait pas nécessairement de la plus proche de chez eux.
Enfin, je souhaite ajouter un dernier élément sur l'automobile. Je suis le président de la branche éducation routière du CNPA. Cet organisme regroupe vingt métiers différents autour de l'automobile. Je signale également que l'association WoMen and Vehicles in Europe (WAVE) cherche à promouvoir les métiers de l'automobile auprès des femmes et qu'elle organise chaque année un forum. Dans ce cadre, pourquoi ne pas envisager la constitution d'une branche « Femmes et éducation routière », qui pourrait donner lieu aussi à un forum annuel sur cette thématique ?