Comme mes collègues, je vous félicite pour votre rapport que je trouve, pour ma part, dans la lignée de ceux de M. Delarue qui a toujours insisté sur les manques de notre système pénitentiaire et, plus largement, des lieux privatifs de liberté. La surpopulation carcérale est en effet un vrai problème qui doit être considéré dans sa globalité. On peut en effet faire baisser la surpopulation carcérale de deux manières, soit en condamnant moins, soit en offrant davantage de places. Lorsqu'on regarde la situation carcérale de notre pays par rapport aux pays voisins comparables, nous avons plutôt moins de places de prison. Parmi ces places, certaines peuvent également être qualifiées d'indignes même si de nombreux efforts ont été déployés pour fermer les établissements les moins respectueux de la dignité des détenus et construire de nouveaux établissements. Il reste encore beaucoup à faire. Nous avons certes de très grands centres, mais lorsqu'on commence à faire dormir les détenus sur des matelas au sol, comme j'ai pu moi-même le constater, il est très difficile d'envisager la réinsertion des personnes placées dans une telle situation.
Il faut aussi que nos concitoyens aient conscience des conséquences d'une sévérité accrue des juges. Or, point n'est besoin de la réclamer, puisque les magistrats français sont beaucoup plus sévères que leurs homologues européens. Nous savons également que près de 85 000 personnes condamnées ne voient pas leurs peines appliquées faute de place, puisque le nombre de prisonniers excède de près de dix mille le nombre de places dans les prisons. Il faudra que la Nation tout entière prenne position sur ce sujet de société très mal compris par nos concitoyens.
Sur la question des fouilles, qu'on fasse les fouilles dans les conditions prévues par la loi relative à la lutte contre la criminalité organisée ou au moyen d'appareils spécifiques qui « dénudent » les personnes, comme aux États-Unis, la différence entre ces deux systèmes me paraît peu probante. Vos recommandations sont toujours bienvenues ! Lorsqu'on est en responsabilité et qu'on voit apparaître le rapport du Contrôleur général, on se demande quelles réponses on va devoir apporter à des questions qui sont justes. Il faut continuer à poser ces questions.
On devrait dire très clairement à ce Gouvernement, pour le temps qui lui reste, qu'on ne peut abandonner l'objectif de construire de nouvelles places de prison. Mais leur localisation pose problème. Certains élus veulent des prisons, car elles apportent de la population et de la dotation globale de fonctionnement. D'autres élus n'en veulent pas ou souhaiteraient construire des prisons où l'on ne peut aller, mais dans lesquelles les familles devraient cependant être en mesure de se rendre. Il faudrait organiser une grande concertation nationale sur la question de la localisation des nouveaux établissements. Les dix mille places qui manquent et les vingt-cinq mille qu'il faudrait reconstruire, pour assurer la dignité de l'accueil des détenus, ne résoudraient pas tous les problèmes, car il faut également s'assurer de la possibilité de l'acheminement des familles. À cet égard, on constate une grande inégalité de traitement : certaines prisons disposent de parloirs où les familles peuvent passer plusieurs jours tandis que d'autres établissements n'ont aucune infrastructure de cette nature. L'inégalité de traitement est aussi très grande dans ce domaine.