Intervention de Michel Canevet

Réunion du 2 juin 2016 à 10h30
Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission modifiés

Photo de Michel CanevetMichel Canevet :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je veux à mon tour, au nom du groupe UDI-UC, me réjouir de la diligence avec laquelle nous avons progressé dans l’examen de ces propositions de loi, fruits du remarquable travail accompli par la commission d’enquête, sous la houlette de Marie-Hélène Des Esgaulx et de Jacques Mézard. Ayant participé à cette commission, j’ai pu apprécier la grande qualité de ce travail extrêmement poussé et des propositions qui en ont découlé.

Le groupe UDI-UC se félicite que l’on puisse aujourd’hui avancer dans l’instauration d’un statut général des autorités administratives et publiques indépendantes.

Depuis la création de la CNIL, en 1978, on a assisté à une prolifération de ces organismes. Ces créations étaient bien souvent justifiées par nos obligations européennes ou internationales ou résultaient d’une volonté manifestée par le législateur lors de l’examen de différents textes, sans que les choses aient véritablement été cadrées. Tels sont les éléments qui sont ressortis de nos débats en commission d’enquête.

Il paraissait dès lors extrêmement important de définir un cadre général, et d’abord de savoir de quoi l’on parlait. En effet, personne n’était capable, au moment où la commission d’enquête a commencé son travail, de définir ce qu’était une autorité administrative indépendante et quelles instances relevaient de cette catégorie. On se fondait simplement sur les listes fournies par le secrétariat général du Gouvernement.

Le travail d’investigation mené par la commission d’enquête du Sénat a permis d’établir une liste de vingt-trois organismes pouvant prétendre au statut d’autorité administrative indépendante. L’Assemblée nationale a souhaité en ajouter trois. Le groupe UDI-UC partage l’idée qu’il faut en rester à la liste proposée initialement par le Sénat, dont les fondements nous semblent plus solides.

Je prendrai un seul exemple, celui du Médiateur national de l’énergie. Il existe déjà la Commission de régulation de l’énergie, qui joue effectivement un rôle d’autorité administrative indépendante. Est-il nécessaire que, pour le même secteur d’activité, coexistent deux autorités administratives indépendantes ?

En outre, si nous décidions finalement d’octroyer au Médiateur national de l’énergie le statut d’autorité administrative indépendante, d’autres médiateurs ne manqueraient pas de revendiquer celui-ci. Cela risquerait de conduire à une expansion du nombre d’organismes relevant de ce statut.

Nous partageons aussi, monsieur le rapporteur, l’idée que l’initiative de la création de ces autorités administratives indépendantes doit revenir au Parlement. Ne pas être reconnu comme autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante n’empêchera pas un organisme de bénéficier d’une certaine indépendance dans l’exercice de ses missions. Toutefois, il est souhaitable que le statut soit extrêmement clair, notamment pour ce qui concerne les règles de fonctionnement de ces autorités administratives ou publiques indépendantes et les conditions de nomination de leurs membres.

Nous tenons à appeler l’attention du Sénat sur le fait que la prolifération de ces autorités a entraîné une augmentation significative des moyens qui leur sont consacrés, dans un contexte de raréfaction de la ressource publique. On peut en effet considérer que le coût global de fonctionnement de l’ensemble des quarante-deux instances considérées comme étant des autorités administratives ou publiques indépendantes avoisine 600 millions d’euros, montant à rapprocher des 630 millions d’euros de crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État »…

C’est dire que ces autorités pèsent d’un poids très significatif sur le budget de l’État. Au regard de l’importance de la dépense consentie, il apparaît nécessaire que le contrôle de ces organismes soit mieux défini. Jusqu’à présent, la Cour des comptes pratique des contrôles ponctuels, mais les choses ne sont pour l’heure pas véritablement cadrées. L’adoption de la proposition de loi permettra que, comme pour l’ensemble des institutions de l’État, des comptes soient rendus devant la représentation nationale, ce qui est absolument nécessaire. En effet, certaines de ces autorités peuvent s’apparenter à des démembrements de l’État, pour des raisons tout à fait légitimes tenant à leur nécessaire indépendance. En tout état de cause, il convient que nous puissions les contrôler. C’est pourquoi j’approuve totalement la proposition que ces autorités administratives indépendantes remettent au Parlement un rapport annuel, dont la représentation nationale pourra prendre l’initiative de débattre. Il paraît en effet logique que l’on puisse analyser le fonctionnement de ces institutions.

Nous n’avons pas voulu aller plus loin que la définition d’un statut général des autorités administratives indépendantes, en engageant des processus de regroupement de certains organismes, comme cela s’est fait par le passé – je pense en particulier au Défenseur des droits, issu du regroupement de quatre autorités préexistantes. La manière dont le Défenseur des droits remplit sa mission aujourd’hui montre, à mon avis, que ce regroupement était tout à fait justifié.

Il me semble que le Parlement devra réfléchir à d’autres regroupements. Poursuivre cette démarche paraît souhaitable pour des questions d’efficience, mais aussi de lisibilité pour le public. En effet, si les autorités sont trop nombreuses, personne n’y comprend plus rien. Cette situation peut être source d’opacité et de doutes sur l’organisation de notre République et de nos institutions. Il est nécessaire de clarifier les choses.

Pour conclure, j’indique que je ne partage pas l’idée émise tout à l’heure par notre collègue écologiste de limiter le cumul dans le temps des mandats de parlementaire, à l’instar de ce qui est prévu pour les mandats de membre d’une AAI : en effet, il ne s’agit pas du tout de la même chose. Il faut revenir sur terre !

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