Dans ce contexte, la préservation du foncier agricole est aujourd’hui devenue une urgence et un enjeu important pour tous nos territoires. Les élus locaux en ont parfaitement conscience, car l’étalement urbain coûte très cher et alourdit les charges des collectivités locales.
Dans le Nord, l’agriculture a pu s’adapter à ce phénomène grâce à son intensification, à la diversité de ses productions, au développement des circuits courts, mais surtout grâce aux règles en vigueur en matière d’urbanisme. La diminution du nombre d’exploitations y est même moins rapide que sur le reste du territoire national.
Les outils actuels et les évolutions permises par les textes récents répondent bien aux besoins du monde rural. La loi ALUR de mars 2014, notamment, a renforcé la lutte contre l’artificialisation des sols. La loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, adoptée au mois d’octobre de la même année, a créé la commission de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Enfin, la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, entrée en vigueur au mois d’août dernier, permet aux PLU d’autoriser la construction d’annexes au sein des zones agricoles et naturelles.
Les constructions ou installations nécessaires à l’activité agricole et l’entretien du bâti restent donc toujours possibles. C’est pourquoi nous ne pouvons pas nous expliquer cette remise en question de l’équilibre existant.
En réalité, la présente proposition de loi, dont l’objet affiché est de répondre à la crise du logement en milieu rural, ne crée aucun droit nouveau, mais elle envoie un mauvais signal en matière de protection du foncier et ne permet pas d’appréhender la pluralité des ruralités. Au regard de la diversité de nos territoires, il est primordial de penser les efforts de construction en ayant conscience des réalités locales. C’est tout l’enjeu de la nouvelle dynamique engagée par le Gouvernement au travers des comités interministériels aux ruralités et du plan de relance de la construction lancé en 2014.
De nombreuses mesures spécifiques aux territoires ruraux ont été prises concernant le logement social, la simplification de la construction, mais aussi la revitalisation des centres-bourgs ou encore l’accession à la propriété. On peut citer, par exemple, l’amélioration du prêt à taux zéro et son extension aux logements anciens.
Par ailleurs, le troisième comité interministériel aux ruralités, qui s’est tenu voilà quelques jours à Privas, a validé le redéploiement de plus de 40 % des crédits du programme « Habiter mieux » de l’ANAH vers la rénovation des logements en milieu rural, soit un objectif de près de 30 000 logements rénovés.
Ces mesures favorisent le développement d’une offre adaptée, notamment en direction des personnes âgées isolées, bénéficiant de faibles revenus et vivant en milieu rural. Elles sont primordiales pour les territoires ruraux qui disposent d’un potentiel important de logements à rénover et qui, comme dans le Nord, présentent un nombre élevé de propriétaires occupant des logements anciens, un vieillissement de la population, une forte demande locative liée aux besoins créés par la décohabitation des jeunes, une diminution particulièrement forte de la taille des ménages et une population à faibles revenus.
Après une longue période de baisse de la construction de logements dans les régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie, ces mesures, tel le plan de relance que j’ai évoqué, portent aujourd’hui leurs fruits. Il en va de même à l’échelon national. La construction de logements neufs est en hausse sur les douze derniers mois, mais c’est surtout dans les secteurs du logement collectif et de l’entretien et de la rénovation que l’activité redémarre le plus fortement.
Nous devons, à l’évidence, rester mobilisés, mais les mesures gouvernementales, qui produisent aujourd’hui des effets encourageants, permettent aux élus de répondre aux besoins si particuliers des territoires ruraux et de leurs habitants.
En conclusion, je dirai que ce n’est certainement pas un hasard si ce texte présenté par la majorité sénatoriale est examiné pendant le congrès des maires. Il s’agit à l’évidence d’un texte d’affichage politique.