Si l'on cherche cette fois à identifier les acteurs de l'eau, on reste abasourdi par la multitude d'intervenants potentiels. En voici la liste, et encore sommes-nous bien conscients qu'elle n'est pas exhaustive : des structures d'expertise au niveau international, qu'elles soient dédiées aux évolutions climatiques ou spécialisées dans le domaine de l'eau ; des centres de décisions européens, soit au moins quatre directions générales au sein de la Commission ; plusieurs ministères français, l'environnement, mais aussi l'agriculture, la santé ou l'aménagement du territoire ; un foisonnement d'instances spécialisées, dénommées observatoire public, office public, agence nationale, conseil, comité, centre, académie, et j'en oublie certainement ; tous les niveaux de collectivités territoriales, communes, intercommunalités, départements ou régions ; enfin, bien sûr, parce que, depuis la loi de 1964, la ressource en eau fait l'objet en France d'une gestion intégrée par bassins hydrographiques, il convient de citer les comités de bassin, les préfets coordonnateurs de bassin et les agences de l'eau.
La gestion par bassins apparaît comme un modèle d'organisation tout à fait pertinent. Cependant, je trouve que l'appellation « parlements de l'eau », officiellement utilisée pour désigner les comités de bassin, est quelque peu surfaite car ce ne sont que des organismes consultatifs. Il faut le dire, les agences de l'eau sont des agences de l'État et les bassins sont administrés de façon très centralisée. Si les résultats obtenus au regard des objectifs fixés à la suite de la DCE sont aussi maigres, c'est dû à l'absence de relais entre la politique décidée au niveau national, menée par les agences de l'eau, et les territoires.
La conséquence s'impose d'elle-même : face à cette pluralité d'intervenants, entraînant émiettement des compétences et dilution des responsabilités, comment savoir avec certitude qui décide, qui choisit et qui arbitrera, le cas échéant, les conflits d'usages ? Il est donc urgent, à notre sens, de clarifier l'organisation de notre gestion de l'eau, pour accorder plus de flexibilité et plus de place aux acteurs locaux.
En ce sens, de nouveaux outils de gestion, encore en devenir, restent à renforcer, je pense notamment aux projets de territoires ou à la Gemapi, que notre collègue Pierre-Yves Collombat connaît bien, qui peuvent se révéler performants si les collectivités concernées savent s'en emparer. La grande question à venir est de savoir si celles-ci vont être en mesure, au travers de la Gemapi, de relayer les instructions de l'État sur un sujet essentiel pour les populations.
Telles sont, monsieur le Président, chers collègues, les conclusions de notre étude. Si nous parvenons, par nos questionnements et nos inquiétudes, à sensibiliser les décideurs et, plus largement, nos concitoyens à l'acuité du problème de la ressource en eau et à la nécessité d'anticiper les conflits d'usage pour ne pas en souffrir demain, nous aurons le sentiment du devoir accompli. Les solutions seront longues à mettre en place. Nous formulons des préconisations. Sans doute ne feront-elles pas l'unanimité.