Intervention de Michèle André

Réunion du 7 juin 2016 à 14h30
Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

Photo de Michèle AndréMichèle André, présidente de la commission des finances :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je commencerai en évoquant à mon tour quelques chiffres.

Sur les 106 mesures attendues, 83 sont parues, soit 80 %, mais seulement 40 % ont été prises dans le délai réglementaire de six mois. Les lois de finances sont toujours votées dans des délais très brefs ; il est dommage que les mesures d’application ne soient pas soumises à un calendrier aussi serré.

Nous contrôlons l’application des lois votées par le Parlement, mais la législation financière se fait de plus en plus par ordonnance, en particulier lorsqu’il s’agit de transposer des directives.

J’ai constaté que, si 8 projets de loi ont été déposés pour ratifier les 10 ordonnances prises sur le fondement des habilitations données par la loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne du mois de décembre 2014, aucune ordonnance n’a été ratifiée à ce jour. L’une d’entre elles le sera bientôt ; c’est celle qui transpose en droit français tout le dispositif de l’Union bancaire, du mécanisme de résolution unique et de la garantie des dépôts. La procédure retenue a été celle d’un amendement déposé par le Gouvernement au projet de loi « Sapin II ».

Nous contrôlons aussi la remise des rapports demandés au Gouvernement. Je voudrais le rappeler, si les parlementaires demandent des rapports, ce n’est pas toujours pour le plaisir ou pour contourner l’article 40 ; c’est parce qu’ils considèrent que les lois ou les politiques publiques doivent faire l’objet d’évaluations, afin, au besoin, d’être améliorées.

La commission des finances travaille beaucoup cette année sur les questions de fraude, d’évasion ou d’optimisation fiscales internationales. Le projet de loi « Sapin II », que nous examinerons bientôt, nous amènera à poursuivre notre effort, puisqu’il comporte des dispositions transposant dans notre droit interne des recommandations du projet BEPS, pour Base Erosion and Profit Shifting, de l’OCDE.

À cet égard, il nous aurait été particulièrement utile de bénéficier depuis le début de l’année des deux annexes au projet de loi de finances relatives, pour l’une, au fonctionnement de notre réseau de conventions fiscales et, pour l’autre, à la mise en œuvre par l’administration fiscale des divers outils permettant de lutter contre l’évasion fiscale des multinationales. Nous avons interrogé publiquement le ministre du budget et des représentants de l’administration fiscale, qui nous ont promis ces documents dans les meilleurs délais. Nous attendons encore…

À l’inverse, il arrive que des rapports fournissent des informations utiles au travail législatif. La loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance vie en déshérence prévoyait, à la demande du Sénat, la remise d’un rapport au mois de mai 2016. Une lecture attentive de ce document nous a permis, à M. le rapporteur général et à moi-même, d’identifier des difficultés dans la mise en œuvre de cette loi ; certaines ne pourront être résolues que par de nouvelles modifications législatives.

Ainsi, le montant cumulé des contrats collectifs de retraite non réglés après la cessation d’activité du bénéficiaire est particulièrement élevé, jusqu’à 7 milliards d’euros selon les estimations de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR. Cela montre que le phénomène a été fortement sous-estimé jusqu’à aujourd’hui.

Je conclurai en constatant, de manière assez banale, que l’absence de publication des mesures réglementaires peut porter préjudice à la mise en œuvre de réformes attendues.

À trois jours du début de l’Euro, je prendrai l’exemple de l’article 67 de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, qui a réformé la taxe de séjour, et à la suite duquel un décret a prévu la publication, le 1er juin et le 31 décembre, d’un fichier informatique reprenant les informations relatives à la taxe de séjour dans toutes les communes l’ayant instaurée.

Il s’agit notamment de permettre aux plateformes de type Airbnb, qui peuvent désormais collecter la taxe de séjour pour le compte des logeurs, de mettre en place ce système de manière simple pour chaque commune, sans avoir à se procurer toutes les délibérations une à une. Aujourd’hui, Airbnb ne collecte la taxe de séjour qu’à Paris et à Chamonix ! Les modalités de ce fichier doivent être précisées par un arrêté… qui n’est toujours pas paru.

Par conséquent, les communes ne bénéficieront pas autant qu’elles l’auraient pu des recettes liées à l’organisation de l’Euro 2016. Afin de limiter les inconvénients d’une telle situation, le ministère de l’intérieur a toutefois mis en ligne les délibérations scannées des communes qui les ont transmises.

Telles sont les quelques observations que je voulais formuler. Je remercie particulièrement M. le président du Sénat et M. le président Claude Bérit-Débat de leur investissement en faveur de la bonne application des mesures votées par le Parlement.

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