L’extrême gravité de la situation financière d’EDF et les conséquences de nos retards sur notre capacité à faire évoluer le système énergétique français sont aujourd’hui telles que je tremble, très sincèrement, pour le service public à la française, du moins si nous continuons de vivre dans le déni du monde réel.
Souvenez-vous, mes chers collègues, que l’endettement d’EDF s’élève déjà à 37 milliards d’euros, de sorte que le mur d’investissements auquel le groupe doit faire face paraît aujourd’hui très clairement infranchissable. À lui seul, le grand carénage des centrales nucléaires pourrait coûter entre 50 milliards d’euros, selon EDF, et 100 milliards d’euros, selon la Cour des comptes. Une somme à laquelle il faut ajouter les 2, 5 milliards d’euros correspondant au rachat de l’activité réacteurs d’Areva, aujourd’hui en faillite virtuelle. Sans oublier, bien entendu, l’investissement de 18 milliards de livres sterling dans l’EPR d’Hinkley Point, qui a déjà provoqué la démission du directeur financier du groupe.
Ce n’est pas faisable ! Sauf à vendre les bijoux de famille : RTE aujourd’hui et, demain, probablement, ERDF, qui est le socle de l’égalité à la française dans le domaine de l’accès à l’électricité.
Je le dis et je le répète : notre principal problème est l’effondrement du prix de gros sur le marché de l’électricité. Songez que, en moyenne, ce prix est passé de 42 euros le mégawattheure à la fin de 2014 à 28 euros aujourd’hui, alors qu’EDF considère que, à moins de 37 euros, le système n’est plus viable…
Sans doute M. Lenoir peut-il m’opposer sa démonstration, que je connais bien, sur la différence entre le prix de l’électricité d’origine renouvelable et le prix de gros, celui de l’électricité qu’on achèterait sur un marché libéralisé : de cette soustraction résultent 100 milliards d’euros de contributions. Seulement voilà : aujourd’hui, le même calcul réalisé pour le tarif de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, l’ARENH, donne un montant d’argent public bien supérieur encore !