Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous avons raison d’être collectivement exigeants sur les conditions d’application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
L’ampleur des enjeux environnementaux et leurs conséquences sur toute l’activité économique, ainsi que sur les perspectives de croissance et d’emplois, nous rendent en effet doublement comptables, et ce d’autant que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte nous y invite.
Cette loi fixe en effet les grandes lignes d’une trajectoire à la fois réaliste et volontaire de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre : 40 % de réduction de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030, ainsi qu’une division par quatre de ces émissions entre 1990 et 2050. Au regard des engagements que nous avons pris lors de la COP 21 et du rôle majeur de la France dans ces négociations, elle anticipe et représente le bras armé de la concrétisation de l’accord de Paris.
Vous me permettrez d’être plus particulièrement attentif à la mise en œuvre de l’article 173, consacré à la stratégie nationale bas-carbone.
La philosophe Cynthia Fleury disait que la construction de l’État de droit était l’aventure du fossé entre les principes et les pratiques. Or, si la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique sur le plan international sont des principes fondamentaux, la stratégie nationale bas-carbone et la mise en place de budgets carbone en déterminent les pratiques.
Le décret du 18 novembre 2015, qui est donc en vigueur depuis six mois, précise d’ores et déjà les modalités de cette stratégie pour l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, ainsi que pour les personnes morales de droit public. Il définit ainsi le périmètre des budgets carbone par lesquels la réduction de ces émissions passera, en excluant pour le moment l’agriculture et la foresterie.
L’évaluation des premiers effets produits par ce décret me paraît pour le moment quelque peu prématurée. Rappelons que la stratégie nationale bas-carbone fera l’objet d’une révision à la fin du mois de juin 2019, en s’appuyant sur des évaluations données à un rythme biannuel par le Conseil national de la transition écologique. Une évaluation sectorielle dans six mois, au moment de la discussion budgétaire, sera sans doute des plus opportunes.
Toutefois, à ce stade, il me paraît fondamental de ne pas briser la dynamique d’investissement amorcée par les budgets carbone dans les domaines de la construction, de l’industrie, des déchets ou des énergies renouvelables.
En effet, la stratégie nationale bas-carbone ne constitue pas en soi un frein à la vitalité économique. Au contraire, elle vise précisément à définir une feuille de route pour réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en garantissant une soutenabilité économique sur le moyen et le long terme. Elle nécessite des investissements et de l’innovation, nerf de la guerre de la compétitivité économique à venir.
Par ailleurs, je ne doute pas que la concrétisation de l’accord de Paris fera de la qualité de la production décarbonée un argument indispensable à l’exportation. Je plaide pour que la prise en compte de la stratégie nationale bas-carbone intervienne plus systématiquement dans chacune de nos décisions, au Parlement comme dans nos territoires, en pleine cohérence.
Mes chers collègues, le basculement vers une production décarbonée et une lutte efficace contre le dérèglement climatique supposent non seulement de la cohérence mais aussi une visibilité sur le long terme. À ce titre, et afin de renforcer la visibilité des acteurs économiques, la mise en place d’une tarification carbone constitue un véritable atout.
Avec une trajectoire ambitieuse pour la contribution climat-énergie, qui est fondée sur une valeur de la tonne de carbone fixée à 56 euros en 2020 et à 100 euros en 2030, la France donne indéniablement l’exemple !