Nous examinons aujourd'hui le projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Mongolie, d'autre part. Cet accord, peu contraignant, a vocation à servir de cadre général pour de futures coopérations entre l'Union européenne et la Mongolie, pays avec lequel la France entretient des liens dont Nathalie Goulet, vice-présidente du groupe d'amitié France-Mongolie, connaît l'importance.
Tout d'abord, quelques éléments de contexte. Comme vous le savez, la Mongolie est un Etat enclavé entre la Russie, au Nord, et la Chine, au Sud. Elle est historiquement très liée à ses deux voisins. Elle a fait partie de l'Empire chinois pendant 300 ans, puis a été soumise pendant plus d'un demi-siècle à l'influence de son voisin soviétique.
Depuis la transition démocratique, qui est intervenue de manière pacifique au début des années 1990, la Mongolie a tenté de déployer une politique étrangère autonome. Pour ce faire, elle tente de se rapprocher de ses « troisièmes voisins » : le Japon, la Corée du Sud, mais également les Etats-Unis et l'Europe. L'accord-cadre de coopération et de partenariat avec l'Union européenne s'inscrit dans ce contexte.
Du côté de l'Union européenne, il s'agit de renforcer la relation avec un Etat qui, s'il n'est pas a priori de toute première importance stratégique pour l'UE, constitue néanmoins un partenaire utile en Asie du Centre-Est. Nous partageons de nombreuses valeurs avec ce pays, à commencer pas son fort attachement aux droits de l'homme. Le prochain rendez-vous du Dialogue Asie-Europe se tiendra d'ailleurs dans la capitale mongole, à Oulan-Bator, en juillet prochain.
Avant d'en venir à l'accord lui-même, je vous donnerai quelques éléments sur la situation du pays. La Mongolie est une toute jeune démocratie, mais elle est remarquable par sa stabilité et son attachement aux droits de l'homme. Le pays a connu plusieurs alternances démocratiques depuis la fin du régime de parti unique au début des années 1990. L'actuel président de la république, M. Elbegdorj, est l'un des principaux artisans de la transition démocratique engagée à la fin des années 1980.
En matière économique, la Mongolie est un pays en développement, avec 12 milliards de dollars en 2014 pour 3 millions d'habitants, soit environ 4.170 dollars par habitant, selon les chiffres de la Banque mondiale. Le sous-sol du pays recèle de très importantes ressources minières, qui font de la Mongolie un véritable « coffre-fort minéralogique » en Asie. La prospection minière, engagée dans les années 2000 a permis une très forte croissance au tournant des années 2010, portée par la hausse des cours des matières premières : en 2011, la croissance a atteint un taux record de 17,5%. Le pays connaît des difficultés conjoncturelles importantes depuis 2014 du fait de la chute du prix des matières premières et du ralentissement de la croissance en Chine, premier partenaire commercial de la Mongolie. Pour les années à venir, le pays bénéficie néanmoins de bonnes perspectives de redressement, avec la mise en chantier de nouveaux gisements à partir de 2018. La richesse du sous-sol garantit la solvabilité du pays à long terme, mais est aussi un vrai facteur de vulnérabilité : le pays est très fortement exposé à la variation du prix des matières premières et à l'évolution de l'environnement régional.
Concernant les relations extérieures de la Mongolie, j'ai déjà souligné que le pays entretient des relations étroites avec ses voisins russe et chinois. La Chine est le premier investisseur, le premier client et le deuxième fournisseur du pays. Elle absorbe 90 % des exportations mongoles. La Russie est le premier fournisseur de la Mongolie et un investisseur important : la société des chemins de fer russe détient ainsi 50 % de la compagnie mixte qui opère en Mongolie.
L'Union européenne est un voisin plus lointain. Elle est néanmoins le troisième partenaire commercial de la Mongolie après la Chine et la Russie. L'UE est largement bénéficiaire, puisque les exportations européennes vers la Mongolie ont représenté 319 millions d'euros en 2015, contre des importations de 84 millions d'euros seulement.
La France, de son côté, occupe le 9e rang des fournisseurs de la Mongolie, tandis qu'elle se classe au 12e rang de ses clients en 2015. En matière d'exportations, elle est le 2e pays européen derrière l'Allemagne et devant la Pologne. Avec 14 millions d'euros d'exportations contre 4 millions d'euros d'importations, nos exportations vers la Mongolie ont encore largement excédé nos importations en 2015.
Selon la Direction générale du Trésor, la France est le troisième investisseur européen en Mongolie. Les entreprises françaises sont présentes dans le domaine minier : Areva conduit des opérations d'exploration en Mongolie depuis une vingtaine d'années et vient d'obtenir deux licences d'exploitation pour des gisements d'uranium. Le groupe Engie est également présent en Mongolie. Il fait notamment partie d'un consortium qui va être chargé de la construction et de l'exploitation d'une centrale à charbon à Oulan-Bator.
J'en viens finalement à l'accord-cadre de partenariat et de coopération, signé à Oulan-Bator en 2013. Je ne crois pas utile d'entrer dans le détail de ses stipulations. L'accord ne comprend pas moins de neuf titres et soixante-quinze articles, pour l'essentiel des stipulations peu contraignantes par lesquelles les deux parties s'engagent à coopérer dans un ensemble très large de domaines.
Les parties conviennent ainsi de coopérer en matière économique, en matière de développement durable, en matière de sécurité, de justice, de migrations, ou encore dans les domaines de l'éducation, de la culture, du tourisme, de la santé et de la gestion des risques de catastrophes...
Le ministère des affaires étrangères m'a confirmé que, dans sa rédaction, cet accord est très similaire aux accords du même type passés par l'Union européenne, avec par exemple la Corée et le Vietnam. A l'évidence, cet accord vaut surtout pour les futures coopérations qu'il permettra de développer par des accords plus contraignants.
Certaines de ces futures coopérations sont d'ailleurs annoncées dans l'accord. Il prévoit ainsi la conclusion « dans les plus brefs délais » - je cite - d'un accord bilatéral relatif aux indications géographiques. L'accord-cadre envisage également un accord sur le commerce des matières nucléaires.
D'autres coopérations sont prévues sous forme plus informelle, comme un « dialogue sur les droits de l'homme », qui devrait être engagé à partir du deuxième semestre 2016. La Mongolie a par ailleurs sollicité l'expertise de l'Union européenne en matière de négociations commerciales, d'infrastructures et de sûreté nucléaire, en particulier.
Il convient pour finir de noter que l'accord ouvre des perspectives de coopération intéressantes du point de vue de la France. Notre pays n'a pas attendu la signature de cet accord pour engager un certain nombre de coopérations avec la Mongolie. Un accord-cadre de protection des investissements a été signé dès 1991. Dans le secteur agricole, un accord de coopération a été signé à l'occasion de la visite du ministre des Affaires étrangères en Mongolie en 2013. Il vise à accompagner les programmes d'importation d'animaux vivants français que la Mongolie souhaite intensifier et à mettre en place des formations destinées aux professionnels mongols pour une valorisation de leurs produits de qualité grâce aux appellations d'origine. La visite du président mongol en France en novembre 2015 a également été l'occasion d'établir une coopération dans le domaine de la génétique bovine. Dans le domaine culturel, des accords-cadres dans le domaine du tourisme et de la culture signés en 2005 ont également été renouvelés à cette occasion.
A l'évidence, l'accord-cadre de coopération UE-Mongolie ne peut que renforcer les coopérations que nous menons avec ce pays. L'ouverture de nouveaux chapitres de coopération dans le secteur minier, le secteur du tourisme et le secteur agro-alimentaire, en particulier, représente des perspectives intéressantes pour notre pays.
A la veille du Dialogue Asie-Europe qui se tiendra à Oulan-Bator en juillet, il me semble donc tout à fait opportun de procéder à la ratification de cet accord. L'accord a déjà été ratifié par l'ensemble des pays de l'Union à l'exception de l'Autriche, de la Grèce, de l'Italie, de l'Irlande et de notre pays. C'est pourquoi après un examen attentif, je recommande l'adoption de ce projet de loi. Il sera examiné en séance publique, en procédure simplifiée, le 16 juin prochain.