… dont les appointements mensuels, selon les médias, avoisineraient 2 000 euros.
Comment, au demeurant, imaginer éliminer le risque de conflit d’intérêts par un simple tirage au sort du président de la Cour et une affectation aléatoire des affaires à traiter ?
Le Gouvernement avait soutenu l’idée, sans succès cette fois, d’imposer aux juges une « double quarantaine » de cinq ans, avant et après leur mandat, leur interdisant d’intervenir comme avocats dans des affaires impliquant les mêmes parties.
J’estime, pour ma part, que seul l’établissement d’une magistrature professionnelle et permanente serait en mesure de nous prémunir des dérives qu’engendrera nécessairement le recrutement à temps partiel de professionnels autrement mieux rémunérés par les milieux d’affaires, dont ils seront inévitablement issus. Je ne crois absolument pas, du reste, à l’autorégulation prônée par la Commission européenne.
Ne pas modifier l’accord sur ces deux points – le mécanisme d’appel et le statut des magistrats – condamnerait la future Cour de justice des investissements à ne demeurer qu’un tribunal d’arbitrage permanent financé sur deniers publics…
Modifier l’accord en ce sens me semble d’autant plus indispensable que l’Union européenne et le Canada se sont entendus sur l’objectif final de fonder une cour multilatérale des investissements, dont la Cour de justice des investissements serait précisément le modèle. Le Parlement luxembourgeois vient d’ailleurs de se prononcer dans ce sens. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous apporter des précisions sur l’état d’esprit et les intentions du Gouvernement à cet égard ?
Ce vote des parlementaires luxembourgeois invite également le gouvernement de ce pays à s’opposer à toute tentative visant à qualifier l’accord de non mixte, répondant ainsi au souhait contraire – semble-t-il – de la Commission européenne, du Royaume-Uni, de la Finlande, de l’Espagne, de l’Estonie, de la Suède, du Portugal, de la Lituanie et de Chypre.
On comprend que la tentation soit grande, pour ces États, de sanctuariser les avancées commerciales notables de l’accord. Cependant, vouloir se dispenser de la ratification par les Parlements nationaux, c’est, à mon sens, vouer l’accord à l’échec. Les Parlements nationaux, en particulier notre assemblée, doivent être consultés, et je ne pense pas trahir l’opinion générale en estimant que c’est l’avis d’une très grande majorité de nos concitoyens et de nos collègues.
L’idée même que l’accord puisse être considéré comme non mixte rendrait celui-ci d’autant plus inacceptable, quand bien même les avancées et les garanties obtenues sont considérables, ce que je ne nie pas. Le dispositif de règlement des différends est incomplet et ne peut être adopté en l’état, encore moins à une majorité qualifiée des États et à une majorité simple des parlementaires européens, puisque, avec un accord non mixte, c’est bien de cela qu’il s’agirait. Une telle situation mettrait à mal tous les efforts consentis pour conjuguer contrôle démocratique et crédibilité de l’Union européenne sur la scène internationale.
Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, à quel point en sont les discussions avec les autres États membres concernant le caractère mixte de l’accord ?
Enfin, mes chers collègues, je ne saurais terminer mon intervention sans aborder une question qui pourrait sembler anecdotique au regard de ce que je viens d’évoquer, mais qui ne l’est pas. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, quelles sont les mesures envisagées par l’Union européenne et les États membres pour empêcher les entreprises étrangères sans réelle activité au Canada d’y implanter des filiales, afin de pouvoir bénéficier des dispositions avantageuses de l’accord ? Je pense notamment aux entreprises américaines, qui pourraient utiliser ce dernier tel un cheval de Troie.
En conclusion, si le système de règlement des différends n’évolue pas, la ratification de ce bon accord global ne pourra se faire qu’en déclarant son caractère non mixte, en raison des objections soulevées sur ce point par différents pays, ce qui serait un échec au regard de l’exemplarité souhaitée pour cet accord.