Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 15 juin 2016 à 21h30
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Article 2

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Cet amendement vise à supprimer le dispositif relatif aux conventions de forfaits.

Aujourd’hui, la durée hebdomadaire de travail d’un salarié travaillant au forfait jours peut atteindre 78 heures par semaine, durée qui ne peut être qualifiée de « raisonnable », pour reprendre les mots du Comité européen des droits sociaux. Ce comité a en outre jugé que la procédure de négociation et le contenu des accords de mise en place de ce forfait n’offrent pas de garanties suffisantes.

Cela n’a pas empêché le Gouvernement et, surtout, la commission des affaires sociales de faciliter le recours à ce dispositif en autorisant les entreprises de moins de 50 salariés à signer des conventions de forfait en heures ou en jours en l’absence d’accord collectif, tout en ouvrant la possibilité de fractionner le repos quotidien de ces salariés.

Encore une fois, il s’agit d’encourager prioritairement la négociation d’entreprise, échelon où les salariés sont plus fragiles, mais aussi de l’ouvrir aux entreprises dont on sait qu’elles n’auront pas les moyens d’assurer le suivi de la charge de travail des cadres.

L’objectif est de mettre en place les conditions permettant d’avoir des salariés corvéables à merci – c’est ce qui est le plus sournois dans ce dispositif –, y compris dans les entreprises de moins de 50 salariés. En effet, ces conventions de forfait permettent, via la réduction des effectifs d’encadrement dans l’entreprise, de faire peser l’obligation de résultat non plus sur le collectif que constitue l’entreprise, mais sur chaque salarié individuellement.

Or, quand on fixe des objectifs de plus en plus élevés à des salariés qui n’ont aucune prise sur les processus dont dépend leur « productivité », on a de fortes chances d’aboutir à des impasses. En effet, selon de nombreuses enquêtes sur le mal-être au travail, voire sur le suicide, c’est l’incapacité des manageurs d’évaluer la charge de travail de leurs subordonnés qui est précisément pointée par les juges.

En outre, en permettant en toute légalité de faire travailler les salariés 50 heures, 60 heures ou 78 heures par semaine, des centaines de milliers d’embauches sont ainsi « économisées » par les entreprises.

Enfin, avec le forfait jours, l’employeur ne payant pas les heures supplémentaires réellement travaillées, ce sont des milliards d’euros de cotisations sociales qui ne sont pas acquittés.

Tel est le sens de notre amendement de suppression.

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