Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 15 juin 2016 à 21h30
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s — Article 2

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Dans la continuité de l’un de nos précédents amendements, visant à supprimer tous les alinéas régressifs sur le temps partiel, nous proposons avec celui-ci de nous arrêter plus particulièrement sur le délai de prévenance.

Depuis le début de la mobilisation sociale et de nos différentes interpellations, vous n’avez eu de cesse, madame la ministre, de répéter qu’il n’y avait pas d’inversion de la hiérarchie des normes. Peut-être allez-vous, là aussi, nous expliquer concrètement que le délai de prévenance n’a pas été modifié, en l’occurrence réduit ?

Comme vous le savez, le délai de prévenance, tel que le prévoit l’article L. 3122-2 du code de travail, est fixé à sept jours en cas de changement de durée ou d’horaires. C’est une obligation de l’employeur, par respect pour son salarié qui n’est ainsi pas mis devant le fait accompli et a le temps de s’organiser dans sa vie personnelle.

Ce qui est grave avec ce projet de loi, c’est que vous prévoyez, d’une part, à l’alinéa 355 – et nous sommes bien là dans ce qui relève de l’ordre public social – un délai de prévenance, mais sans préciser le nombre de jours à respecter, et, d’autre part, à l’alinéa 399, cette fois-ci dans le champ de la négociation collective, la possibilité de réduire à trois jours ce délai. On ne retrouve le délai de sept jours que dans les dispositions supplétives.

Pouvez-vous nous confirmer, madame la ministre, que, dans la très grande majorité des cas, le délai de prévenance ne sera donc plus que de trois jours, au lieu de sept actuellement ?

Comment interpréter cette mesure autrement que par une flexibilité accrue imposée aux salariés, pour ne pas employer le terme « agilité », pourtant très à la mode ? Comment ne pas voir que cette mesure impactera particulièrement la vie des femmes, puisque ce sont les temps partiels qui sont concernés et que 80 % de ces contrats sont occupés par des femmes ?

Peut-être allez-vous me répondre en vous appuyant sur l’alinéa 356, qui précise que le refus du salarié d’accepter cette modification ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement. Mais qui peut honnêtement croire qu’une salariée d’un supermarché, par exemple, pourra sans crainte de répercussions quelconques, plus ou moins visibles, refuser ce changement gentiment proposé par son employeur ? Cela n’existe pas dans la vraie vie !

Cette réduction du délai de prévenance aura bel et bien des impacts négatifs sur les conditions de travail et sur l’organisation personnelle des salariés, et en priorité sur les femmes, parce que ce sont elles qui sont les plus nombreuses dans les TPE et les PME, là où il y a moins d’implantation syndicale.

Je n’ai pas le temps de développer mon propos sur le corollaire de cette disposition, à savoir la majoration plus faible que vous proposez pour les heures complémentaires, ou bien encore sur la rupture d’égalité de traitement entre les salariés à temps plein et celles et ceux à temps partiel.

Avec cet amendement, nous faisons la même proposition que nos collègues députées socialistes Catherine Coutelle et Marie-Noëlle Battistel, au nom de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale.

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