Par cet amendement, nous proposons de réécrire complètement le titre III du livre Ier de la troisième partie du code du travail afin d’y inscrire la notion de temps libre.
Le Groupe de recherche pour un autre code du travail, rappelant la nécessaire reconstitution de la force de travail, rattache la problématique du temps de travail à celle de la santé des salariés. Pour exacte et importante qu’elle soit, cette problématique n’est pas la seule à devoir être prise en compte.
Le temps qui n’est pas consacré au travail n’est pas exclusivement dédié au « repos », une terminologie d’origine européenne qui s’explique historiquement. Ce peut être un temps utilisé pour exercer une deuxième activité professionnelle. C’est aussi le temps de la vie familiale, sociale, amicale, sportive, associative, militante, de loisirs…
Ces vies-là, aussi, sont essentielles : pour la société en général, bien sûr, mais également pour une certaine qualité du travail et pour la vie familiale, qui permet une meilleure éducation des enfants – lesquels, d’ailleurs, sont de futurs travailleurs. Je n’insisterai ni sur l’utilité du temps de formation, pris sur le temps libre, ni sur les mérites de la vie associative.
Il faut aussi prendre en compte l’apport du temps libre pour la nouvelle économie de la gratuité, dont les logiciels libres sont des symboles. Le temps libre représente, pour cette économie, un espace de création indispensable.
Par ailleurs, sans les activités militantes, qui sont, elles aussi, des activités du temps libre, il n’y a pas de démocratie.
La protection du temps libre est, de plus, une question de justice dans la relation de travail. Le contrat de travail est l’échange d’un temps de travail contre un salaire. Le temps libre n’est pas cédé à l’employeur. Il convient qu’il ne puisse pas être interrompu par des demandes d’intervention intempestives.
L’employeur ne doit pas pouvoir modifier unilatéralement, et à sa guise, les horaires de travail pour préempter le temps libre. Le salarié a échangé un temps de subordination contre un salaire. Il n’a pas subordonné sa personne dans son ensemble. Hors de leur temps de travail, les salariés redeviennent des citoyens libres et égaux en droit.
Pour toutes ces raisons, la notion de « temps de repos » a été remplacée par la notion de « temps libre ». Ce changement n’est pas seulement terminologique. Il s’agit d’un choix de société essentiel, qui produit d’importantes conséquences. Il exige notamment une prévisibilité, pour le salarié, de son emploi du temps.