Intervention de Gisèle Gautier

Réunion du 30 juin 2009 à 15h00
Débat sur l'organisation des collectivités territoriales — Ii. – point de vue des groupes politiques

Photo de Gisèle GautierGisèle Gautier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite centrer mon propos sur la question des métropoles, qui constituent à elles seules un enjeu majeur en termes de développement, de gouvernance et de financement.

Constituer des grandes métropoles françaises de taille européenne dont les compétences et le territoire soient élargis représente un défi qu’il nous appartient de relever. Ce point a été confirmé par les réflexions et consultations menées de façon pertinente par les rapporteurs de la mission sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales.

Je tenterai donc de répondre aux deux questions suivantes : pourquoi et comment constituer de grandes métropoles ?

Tout d’abord, observons ce qui se passe en Europe. Le Royaume-Uni a créé le Grand Londres ; Lisbonne, Madrid ou Barcelone disposent de statuts particuliers ; Milan ou Francfort ont entamé une réflexion sur la modification de leur statut.

La compétition internationale est aussi territoriale. Dans ce domaine, la France souffre d’un véritable retard sur ses concurrents européens. Il nous faut donc favoriser le développement de grands centres d’attractivité économique, démographique ou universitaire capables de rivaliser avec des villes européennes comme Barcelone, Milan, Turin, Francfort ou Hambourg.

L’objectif est de rendre plus lisible et plus efficace l’action publique pour donner de nouvelles conditions de développement aux grandes aires métropolitaines, afin d’assurer leur compétitivité en Europe et dans le monde. Les nouvelles métropoles doivent avoir un statut, un périmètre et des compétences clairement définies.

Il est selon moi impératif de créer par la loi un nombre limité de métropoles aux pouvoirs réellement renforcés.

Aujourd’hui, le « fait métropolitain » recouvre des situations très disparates. Je prendrai l’exemple de la métropole de Nantes–Saint-Nazaire, que je connais bien pour y être née. Celle-ci a bien sûr le mérite d’exister, mais de façon très floue, en ce qui concerne tant son image et sa visibilité que ses moyens, qui sont mal définis. Mal répertoriée, elle souffre d’un déficit de notoriété, donc d’impact, pour tout ce qui touche les grandes décisions d’aménagement et les implantations potentielles.

Pour moi, il ne s’agit pas de concevoir la métropole comme le simple prolongement des communautés d’agglomération ou des communautés urbaines. Face à la concurrence internationale, il est souhaitable de concevoir un périmètre qui dépasse les limites du département et, encore plus, des intercommunalités.

Pour autant, il ne s’agit pas non plus de couvrir la France de métropoles. Le nombre de métropoles créées par la loi doit, au moins dans un premier temps, être limité à six, par souci de cohérence. Il me semble en effet que, en les multipliant à l’envi, on diluerait indéniablement l’importance que l’on souhaite leur donner. Il faudra bien sûr examiner de près les critères d’accès au statut de métropole.

Huit métropoles sont citées dans le rapport d’information de la mission temporaire excellemment présidée par notre collègue Claude Belot : Lyon, Lille, Marseille, Toulouse, Nice, Bordeaux, Nantes et Strasbourg, en tenant compte des spécificités de cette dernière.

Pour éviter une fracture territoriale éventuelle, il faudra trouver un équilibre entre la métropole et le reste du territoire, en affirmant tout naturellement la pérennité des communes, qui assurent un lien de proximité direct avec nos concitoyens.

Trois politiques ont une véritable cohérence entre elles : elles gagneraient, sur un territoire homogène, à être mises en œuvre par une seule collectivité. Il est donc nécessaire de regrouper et de coordonner sur ces aires fortement peuplées des compétences aujourd’hui dispersées. Il s’agit tout d’abord de la politique urbaine, aujourd’hui confiée à la commune, par ailleurs des politiques sociales, exercées principalement par le département – je considère personnellement que la compétence sociale doit majoritairement rester dévolue au département, mais il convient de rester prudent : les départements auront-ils les moyens financiers d’assurer cette compétence ? – et, enfin, des politiques économiques, qui sont assurées par la région.

Il me paraît important de clarifier les compétences des uns et des autres, pour éviter les doublons et pour limiter les financements croisés, auxquels nous sommes tous opposés depuis longtemps. Cessons cette politique des guichets ! Ayant exercé par deux fois le mandat de vice-président du conseil régional des Pays de la Loire, j’ai souvent entendu François Fillon, qui en était alors le président, critiquer les financements croisés et la politique des guichets.

Les métropoles doivent disposer des moyens financiers de leurs ambitions : rien ne serait pire qu’un colosse territorial aux pieds d’argile.

Il existe des pistes. Je pense notamment à la dotation globale de fonctionnement métropolitaine, que les rapporteurs de la mission temporaire, Mme Jacqueline Gourault et M. Yves Krattinger, proposent d’instituer à la demande des communes membres.

La mission souhaite également permettre l’institution, par décision des communes membres, d’une fiscalité communautaire se substituant progressivement aux fiscalités communales. Nous aurons besoin de débattre de cette question, afin de la clarifier.

En ce qui concerne la gouvernance, le fait urbain s’impose à tous. Il convient donc d’adapter nos institutions locales à cette réalité.

Les métropoles seraient ainsi des collectivités locales qui bénéficieraient sur l’ensemble de leur territoire de la clause de compétence générale, des compétences départementales et de la compétence économique, partagée avec la région. Quant aux communes, elles conserveraient naturellement la clause de compétence générale.

Par ailleurs, les conseillers métropolitains devraient être élus au suffrage universel direct, au moment des élections municipales, selon un système de fléchage. Cette proposition est attendue depuis fort longtemps pour les EPCI, ou établissements publics de coopération intercommunale. Nous en avons tant parlé que je l’avais qualifiée d’« arlésienne » !

Toutes les listes élues seraient représentées à la représentation proportionnelle des résultats obtenus au scrutin municipal : cela s’appelle l’exercice de la démocratie. Il est également proposé d’attribuer, au sein du conseil métropolitain, un siège au moins à chaque commune membre.

Telle est, pour l’essentiel, ma position sur les métropoles.

En conclusion, il est évident que les collectivités locales sont appelées à jouer un rôle croissant dans le développement économique et social de notre pays. Les grandes agglomérations doivent disposer des outils et de l’organisation à la hauteur de ce défi. Ce sera tout l’enjeu de la création des métropoles, qui devra s’accompagner d’une volonté politique forte. La question de leur statut, question véritablement centrale, devra être posée. Mes chers collègues, additionner les poids démographiques, les talents et les atouts des territoires, c’est à coup sûr nous donner les moyens de réussir cet ambitieux projet !

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