Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, réformer le fonctionnement de nos collectivités territoriales est une nécessité. Notre réflexion doit être inspirée par des principes et des règles, en conformité avec notre conception républicaine de la vie démocratique.
Simplicité, efficacité, responsabilité : ces trois principes élémentaires et de bon sens devraient toujours guider la pratique de notre démocratie, particulièrement à l’échelon local, qui constitue le premier lieu de rencontre de la politique et du citoyen. Oubliez ces principes, et le citoyen se détourne de l’exercice de la vie démocratique : il boude les urnes et abdique toute implication personnelle dans la vie de la cité pour retourner à sa sphère privée. Ce repli individualiste est fatalement préjudiciable au « vivre ensemble », sentiment civique fondamental qui cimente la collectivité humaine et fonde les solidarités.
La règle constitutionnelle précise que notre république est décentralisée. Il en découle une double interrogation. Comment démultiplier sans excès les lieux de pouvoir tout en les inscrivant dans la diversité territoriale ? Comment faire en sorte que cette démultiplication, qui libère les énergies et favorise une gestion au plus près du terrain, se fasse dans l’efficacité, autrement dit en évitant l’éparpillement des compétences et des financements ?
En réponse à ces questions, on peut esquisser plusieurs propositions.
La première, bien évidemment, concerne le couple formé par les communes et les communautés de communes. Je ne m’attarderai pas sur ce sujet, à propos duquel tout ou presque a été dit et sur lequel tout le monde semble peu ou prou s’accorder. Je soulignerai simplement que, si la communauté de communes ne constitue qu’un outil du fonctionnement communal, rien n’oblige à modifier le mode de représentation des conseillers municipaux à la communauté de communes, cette dernière n’étant pas une collectivité susceptible d’entrer en compétition avec la commune.
En ce qui concerne maintenant l’échelon supérieur, j’oserai faire une analogie entre le bloc formé par les communes et les communautés de communes et le couple constitué par les départements et les régions. Suivant cette logique, je vous propose un couple départements-régions dont les rapports seraient de même nature que ceux qui unissent les communes et les communautés de communes. Il s’agirait de faire des régions des communautés de départements.
M. François Patriat a posé une bonne question : dès lors que ces deux collectivités se rapprochent, il faut savoir laquelle aura la prééminence.
Comme au sein des communautés de communes, le bloc constitué des départements et des régions pourrait se voir attribuer une liste de compétences, dont certaines reviendraient obligatoirement à l’un des deux niveaux, tandis que d’autres seraient facultatives et pourraient être exercées par l’un ou l’autre des deux niveaux. Cela permettrait à chaque territoire de s’adapter au mieux à ses spécificités. Bien évidemment, cette proposition devrait logiquement se traduire par l’élection d’un conseiller territorial, qui siégerait dans les assemblées départementale et régionale.
Ces réformes, simples et lisibles, constituent selon moi le minimum que nous puissions faire. Elles conditionnent l’adhésion du citoyen au pouvoir local et favorisent l’efficacité et l’adaptabilité de nos productions collectives. Tout en donnant leur pleine puissance à ces deux regroupements, elles confortent la place centrale de la commune et du département dans l’esprit républicain.
Cet esprit représente la spécificité première de la démocratie française, la « marque de fabrique » originale de notre République ; il génère une grande partie de nos valeurs communes et imprègne puissamment notre imaginaire et les comportements collectifs.
La réussite de la réforme territoriale rejoint ainsi un enjeu de taille : la réaffirmation de cet esprit républicain qui fait notre Nation.