Madame la présidente, mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie d'organiser cette table ronde historique qui témoigne du souci d'une partie de nos institutions de résoudre les problèmes rencontrées par les personnes intersexuées dans notre société.
Si, avec mes collègues juristes ici présents, nous sommes aujourd'hui devant vous, c'est parce que nous sommes préoccupés par le sort réservé en France aux personnes intersexuées et notamment aux jeunes enfants. Il nous semble en effet, en notre qualité de juristes, que les droits fondamentaux de ces personnes - droits au fondement même de notre système juridique - ne sont pas respectés. Ces droits sont d'une part le droit à l'intégrité physique et d'autre part le droit à la vie privée.
Au cours des interventions qui vont suivre, nous allons tenter de vous proposer quelques mesures législatives qui permettraient de mieux assurer le respect de ces droits.
En premier lieu, renforcer le droit à l'intégrité physique. Comme les témoignages que nous avons entendus le démontrent, le bien-fondé des actes médicaux réalisés sur les personnes intersexuées est en débat, qu'il s'agisse des actes réalisés in utero, des interruptions de grossesse pour diagnostic thérapeutique après douze semaines de grossesse, des traitements de féminisation à la dexaméthasone, ou des actes réalisés sur les enfants après leur naissance pour les assigner dans un sexe masculin ou féminin.
Pour les uns, ces actes médicaux seraient des mutilations car il n'y aurait pas de pathologie ; pour les autres, ces actes seraient des traitements. Qu'en pense le droit ? Qu'en pensent les juristes ? Le propos qui va suivre se limitera au cas des enfants traités après leur naissance, mais vous aurez toute latitude pour nous interroger sur les traitements in utero dans les échanges qui suivront. Quelle est donc la licéité des actes médicaux d'assignation sexuée réalisés sur les jeunes enfants ?