Intervention de Albéric de Montgolfier

Réunion du 7 juillet 2016 à 15h10
Orientation des finances publiques et règlement du budget 2015 — Débat puis rejet en procédure accélérée d'un projet de loi modifié

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances :

Tout d’abord, le Gouvernement confirme les hypothèses de croissance du dernier programme de stabilité, soit 1, 5 % en 2016 et en 2017, 1, 75 % en 2018 et 1, 9 % en 2019. Il n’est donc aucunement tenu compte des effets possibles du Brexit. C’était peut-être prématuré, mais il aurait fallu au moins émettre une réserve. Le président de la BCE et nombre d’économistes ont pourtant estimé que cela pourrait avoir une incidence négative sur le PIB de la zone euro.

Le rapport gouvernemental ne comporte aucun élément précis sur l’évolution de la dette publique ou du solde structurel, mais confirme l’objectif d’un retour du déficit effectif en deçà de 3 % du PIB en 2017. Pour l’atteindre, le Gouvernement semble cependant disposé à recourir à des artifices comptables. En particulier, à la suite des annonces du Président de la République, le pacte de responsabilité est modifié en profondeur pour 2017. Alors qu’étaient prévues la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, et une première réduction du taux de l’impôt sur les sociétés, ces mesures ont été écartées au profit d’une prolongation du dispositif de « suramortissement » des investissements, d’un relèvement à 7 % du taux du CICE, d’un renforcement des allégements de cotisations pour les travailleurs indépendants et d’une réduction de l’impôt sur les sociétés pour les PME.

Si l’on peut regretter l’inconstance de la politique fiscale du Gouvernement, les mesures annoncées ont surtout l’avantage de ne coûter que 800 millions d’euros en 2017 en comptabilité nationale. Le gain fiscal effectif pour les entreprises sera extrêmement réduit.

Par ailleurs, le Gouvernement prévoit qu’une baisse de l’impôt sur le revenu, d’un montant maximal de 2 milliards d’euros, interviendra en 2017 « si la reprise économique est plus forte que prévu ». On ignore comment ce critère pourra être apprécié d’ici au dépôt du projet de loi de finances.

Enfin, je souhaiterais insister sur le dérapage des dépenses de l’État en 2017. Hors prélèvements sur recettes et charge de la dette, elles augmenteront de 7, 2 milliards d’euros par rapport au programme de stabilité. Le Gouvernement affirme que cette hausse est ciblée sur trois secteurs prioritaires : éducation et jeunesse, emploi, sécurité. Pourtant, sur dix-neuf ministères, seize verront leurs crédits augmenter ! La cible parait donc bien large…

En dernier lieu, je souhaiterais évoquer brièvement la programmation des finances publiques, même si nous ne savons pas encore si le Gouvernement décidera de présenter un projet de loi à ce sujet cet automne.

Nous avons en effet souhaité publier notre propre « consensus de la croissance potentielle », issu de la consultation des principaux instituts de conjoncture. Celui-ci retient une estimation moyenne de 1, 2 % pour la période de 2015 à 2021, qui est donc significativement inférieure au « consensus » retenu par le Gouvernement pour les années 2016 et 2017 et, dans une moindre mesure, pour 2018.

Retenir le « consensus » des économistes impliquerait ainsi de réaliser 10 milliards d’euros d’économies supplémentaires entre 2016 et 2019, dont près de 7, 5 milliards d’euros pour 2016 et 2017, afin de respecter les objectifs définis par le Gouvernement lui-même.

Ainsi, les hypothèses de croissance potentielle devront être définies avec le plus grand soin, de manière à établir une trajectoire de solde structurel compatible avec le rebond de l’activité économique, mais également garante d’un retour rapide à l’équilibre budgétaire.

En conclusion, je vous rappelle, mes chers collègues, que la commission des finances vous demande de rejeter le projet de loi de règlement, à la fois pour marquer notre désapprobation de la politique budgétaire et fiscale menée l’an passé et pour dénoncer les débudgétisations excessives, s’agissant notamment du PIA, qui rendent quelque peu difficile la lecture de l’exécution du budget de 2015.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion